Haruki Murakami

Un peu de repos dans ce monde à 200 km/h. Y a-t-il plus grand plaisir que de lire et relire son livre de chevet ? Parle-nous donc ici de tes coups de coeur littéraires, ainsi que de tes BD & Comics favoris.

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Aizen
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Haruki Murakami

Message par Aizen »

http://fr.wikipedia.org/wiki/Haruki_Murakami

Que dire de cet auteur hormis qu'il faut absolument le découvrir ?
Tout d'abord à ne pas confondre avec Ryu Murakami, l'auteur des Bébés de la consigne automatique, bien qu'ami leur univers ne se ressemble absolument pas.

La plume de Murakami est belle, décortiquant les moindre fissures de la psychologie humaine, sa mnière de mener un récit est belle et sans fards. Ses romans s'ancrent dans le quotidien japonais, décrivant des hommes, des femmes, qui se heurtent, se blessent, se retrouvent, se quittent. Le fantastique, le mystère affleure dans chacun de ses romans.

Quelques commentaires de critiques de livres ^^.

"Ceux qui n'ont jamais lu cet auteur-culte au Japon découvriront une langue limpide, fluide, presque éthérée, une manière diaphane de raconter une histoire en semblaznt effleurer les choses et les êtres. Jusqu'à ce qu'un incident, un souffle, brouille la surface et nous entraîne vers les profondeurs indétrminées de l'onirisme."
Pierre Sorgue, Télérama

"L'heure est enfin venue de porter Haruki Murakami en triomphe. [...] Pourquoi lui ? Si vous posez la question, c'est que vous n'avez pas encore lu cet auteur immense. Sitôt que vous aurez pénétré dans sin univers, vous aurez compris."

Hénéna Villovitch, Elle
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Message par iori »

rooo je connais pas du tout cet auteur (ben oui je connais le da vinci code, mais après faut pas trop m'en demander non plus :roll:)

mais la critique de témérama est très jolie, et ça donne vraiment envie de lire cet auteur (enfin le jour où je retriuverai le courage de lire :cry:)

merci pour ce topic, j'y repasserai à l'occasion si je lit ce livre (ouai pas demain quoi :lol:)
Jade Von Memeth
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Message par Jade Von Memeth »

J'ai beaucoup entendu parler de cet auteur bien que je n'ai lu aucun de ses livres (la honte je sais :oops: ).

Mais parmi ces ouvrages les plus connus, il y a je crois Les Amants du Spoutnik et Kafka sur le rivage !

Je vais peut-être m'y essayer ;-)
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Aizen
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Message par Aizen »

En fait ce sont ses deux derniers livres parus en France. La plupart sont peu onéreux dans la collection 10/18 mais le dernier, Kafka est à 23 Euros =).

Moi je recommande plus particulièrement :

Au sud de la frontière, à l'ouest du soleil qui est un enchantement constant (Les amants du Spoutnik est très beau aussi =) )
The Laughing Man
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Message par The Laughing Man »

Yeps, excellent auteur.... j'aime bcp le style.... .
Enfin même si il est vrai, je n'ai lu que "Kafka on the Shore" :oops:

Vais devoir serieusement devoire me mettre a "Norvegian Wood".... . ;-)

Et pas mal ta description Aizen sur Murukami ..... ;-)
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Akenehi
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Message par Akenehi »

Moi je connais Murakami Ryu et pas Murakami Haruki :grin: En tout cas ta description du style de l'auteur donne envie de lire ces livres ;-)

Il manque juste sa bibliographie et ca serait parfait ... ou ca de la faineantise ? :siffle:
Aizen
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Message par Aizen »

Pour la bibliographe il suffit de cliquer sur le lien ;-) .

Sinon je viens de lire Après le tremblement de terre de Murakami donc. C'est un recueil de nouvelles, d'un niveau que j'ai trouvé assez hétérogène mais dont certaines se démarquent largement par leur qualité poétique et leur façn de mêler imaginaire et réalité notamment Galette au miel et Crapaudin sauve Tokyo ^^.
Dernière modification par Aizen le jeu. 09 mars 2006, 18:11, modifié 1 fois.
Akenehi
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Message par Akenehi »

=_____=


J'avais pas fait attention qu'il y avait un lien. Merci de m'avoir ouvert les yeux :fou:
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Message par Aizen »

Allez réuppage de topic pour parler du dernier Murakami que je viens de lire (j'ai Kafka sur le rivage qui m'attend maintenant :langue: !).

"Les chroniques de l'Oiseau à ressort" sont absolument superbes mêlant l'imaginaire et le quotidien avec un tel réalisme qu'ils en paraissent indissociable. Autant le dire tout de suite pour ceux qui ne veulent pas lire le succint résumé, ce livre est un enchantement. Dans un style toujours aussi simple et épuré, Murakami nous plonge dans le subconscient de chaque personnage incorporant fantaisie et onirisme avec talent.

L'histoire :

Toru Okada est un trentenaire au chômage marié depuis 6 ans avec sa femme Kumiko. Occupant ses journées comme il peut, il se promène dans les environs à la recherche de leur chat Noburo Wataya, portant le même nom que le frère de Kumiko. Ce frère est un personnage en vogue, économiste réputé, il fait son trou dans le monde la télé. Toru n'ayant jamais aimé ce Noburo.

Ce subtil univers va petit à petit se désagréger lorsque sa femme va le quitter du jour au lendemain, sans prendre une seule affaire et le laissant seul et désemparé. Ne comprenant pas, petit à petit il va refaire le fil de son existence tout en partant à la recherche de la raison qui a pu provoquer cette disparition. Au gré de ses rêves, de ses illusions il va tenter d'éclaircir le mystère que sa femme n'a pas voulu lui confier lorsqu'ils attendaient un enfant et qu'elle a avorté, il y a trois ans de cela ? Petit à petit, Toru va glisser dans un monde où le subconscient a des répercussions sur le monde réel. Chose bizarre, une tache bleu aux vertus étranges va apparaître sur son visage...

La brève analyse :

Dans ce livre, à travers de nombreuses métaphores Haruki Murakami, nous plonge dans la subtile difficulté de "comprendre" un autre être. Kumiko a beau avoir été sa femme durant 6 ans, il ne savait quelle secret elle cachait en elle et pourquoi ce secret a pourri son mariage. Peu à peu les liens se désagrègent sans qu'on s'en rende compte et lorsqu'il vient le temps de les renouer, les incertitudes deviennent les seules certitudes face à un monde que l'on ne connaît pas ou que partiellement. A-ton besoin de comprendre l'autre, pour vivre heureux ? En tout cas, l'enquête de Toru montre que si on ne le comprend pas, on ne peut envisager de futur heureux et c'est cette longue quête qui nous est conté à travers les yeux de Toru tentant de renouer le lien perdu avec sa femme.

C'est un roman, littéralement bouleversant et lorsqu'arrive le moment de fermer le livre après la dernière page, on n'en vient à se demander malgré les 850 et quelques pages du récit pourquoi l'histoire ne continue pas.

Un roman que je recommande vivement avec enthousiasme.
The Laughing Man
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Message par The Laughing Man »

J'espere que tu m'en voudras pas Aizen de mettre ces links sur ton topic........ (pas de l'auto pub....), mais j'ai fini hier soir Norwegian Wood et fut...... :oops:

Je pense crois deja avoir dit a quel point j'aimais cet auteur, d'ailleurs, j'ai fait les topics de Kafka sur le rivage et de la ballade de l'impossible..... .

Vais me taper un ptit spoutnik bientot..... ;-)

Pour Norwegian wood ou ballade de l'impossible

http://forum.narutotrad.com/viewtopic.php?t=3699

Pour Kafka on the Shore ou Kafka sur le rivage.

http://forum.narutotrad.com/viewtopic.php?t=2564
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Aizen
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Message par Aizen »

Bien sûr que non :grin: !
Au contraire même, plus de personnes peuvent parler de Murakami mieux c'est ^^.
D'ailleurs il y a un long article dans le dernier Télérama sur ce superbe écrivain ^^.

Voici le lien, et l'article en question ^^ :

http://www.telerama.fr/livres/M0607101213461.html
L'ami Murakami

Dans une société japonaise dépressive, sa plume envoûtante et bienveillante enthousiasme des millions de lecteurs. Ce solitaire dit écouter les défunts. Il aide surtout les vivants à affronter l’existence.

Quand on a rendez-vous au Japon, mieux vaut prévoir d’arriver très en avance. Trouver une adresse relève du jeu de piste de haut niveau. Les noms de rue n’existent pas. Les trois numéros censés délimiter un quartier précis ont vite fait de se transformer en tiercé perdant. Et qui oserait sonner en retard chez Haruki Murakami, homme de silence et de secret, miraculeusement prêt à ouvrir les portes de son pied-à-terre de Tokyo ?
Le rendez-vous a lieu dans deux jours. Deux jours pour se fourvoyer dans les fausses pistes que l’auteur a pris le soin d’ouvrir. Deux jours pour courir à sa propre perte, comme ses personnages têtus et défaitistes.
Depuis une trentaine d’années, l’insaisissable ermite joue au chat et à la souris avec son pays, qu’il fuit régulièrement pour séjourner aux Etats-Unis, en Grèce, en Italie. Si personne ne sait jamais où il se trouve, l’écrivain donne régulièrement de ses nouvelles dans des romans qui se déroulent toujours au Japon. Des histoires envoûtantes où le temps n’existe pas, où les souvenirs se dérobent, où les êtres disparaissent pour mieux renaître à eux-mêmes. Des livres romantiques et métaphysiques qui vous happent comme des gouffres sans fond, pleins de fantômes clairvoyants, de doubles bienveillants, de signes troublants. Les rares interviews de Haruki Murakami sont cousues d’un même fil rouge. Une anecdote saugrenue, fondatrice de toute son œuvre : sa vocation d’écrivain serait née en 1973, au Jingu Stadium de Tokyo, alors qu’il assistait à un match de base-ball.
Allons donc traîner du côté de ce stade, pour voir à quoi ressemble une vocation suspendue au bout d’une batte. Justement, cet après-midi-là, les Buffaloes affrontent les Swallows, l’équipe préférée de Murakami. Au milieu du terrain, une grosse poule en feutrine pointe son canon vers le public, et tire des boulets de tee-shirts promotionnels dans la foule. Les supporters jouent des castagnettes avec des battes en plastique, d’autres agitent des parapluies colorés, comme Totoro dans le dessin animé de Miyazaki. La bière coule à flots, les enfants dansent pieds nus sur des serviettes Hello Kitty, les poumons crachent à l’unisson la chanson Proud Mary, de Creedence Clearwater Revival. Premier mystère insondable : comment cette atmosphère guillerette et légère, kitsch à souhait, a-t-elle pu donner envie à Murakami d’écrire des livres aussi sombres et profonds ?
Plus déroutant encore sera le voyage du lendemain, direction Takamatsu, où se déroule Kafka sur le rivage, son dernier ouvrage paru en France. Peuplé de clochardes ricanantes, de bimbos peinturlurées, de pépères rivés à leur bocal de saké, le train qui mène à cette ville assoupie de l’île de Shikoku passe sur un pont de ferraille démesurément gigantesque. A pic sous les rails, la mer grise, agitée de tourbillons, lèche des îlots brumeux jonchés de petites usines catarrheuses et de cadavres de motos. Au bureau de renseignements de la gare de Takamatsu, on sourit de notre demande. A la sortie du livre au Japon, des hordes de touristes ont déjà envahi la ville, à la recherche de l’inquiétante bibliothèque où se réfugie Kafka, le héros fugueur. Elle n’existe pas, tout comme le sanctuaire où il se réveille en sang. Reste le restaurant de nouilles à 100 yens, où il commande du lait chaud. Les pierres noires du château, qu’un personnage amnésique croit magiques. Et ce corbeau robotique qui suit le visiteur, le regard vide et la patte molle : ne serait-il pas la réincarnation du double de Kafka dans le roman, surnommé le Corbeau ?
Au pied de l’immeuble tokyoïte de Haruki Murakami, les fantômes de son œuvre vous narguent avec la même insistance discrète. Dans la vitrine d’un magasin, un gros mouton en peluche, droit sorti de La Course au mouton sauvage. Sur le même trottoir, une vieille teinturerie rappelle celle où l’épouse du héros de Chroniques de l’oiseau à ressort vient retirer des vêtements avant de disparaître mystérieusement. Au bout de la rue, une femme boiteuse sort de la brasserie Figaro, où l’on sert du mauvais café dans des verres Duralex, comme dans Au sud de la frontière, à l’ouest du soleil. Autant de signes étranges, sinistres et incongrus, essaimés dans ce quartier chic et tranquille, en bordure du cimetière d’Aoyama, au centre de Tokyo.
L’assistante de Haruki Murakami ouvre la porte de l’appartement feutré, vous prie de vous déchausser et de patienter dans le petit bureau. Un cocon zen tapissé de moquette beige, meublé de bois clair, design années 60. Aux murs, des collages énigmatiques d’où émerge toujours un chat noir à l’encre de Chine. Apparaît le maître, sur la pointe de ses chaussettes blanches, en jean sombre et polo sablonneux. Un enfant triste de 57 ans, au regard doux et craintif, le dos voûté, les bras sur la défensive. Haruki Murakami donne la curieuse impression de marcher à reculons, comme dans un film rembobiné au ralenti. Sans doute aimerait-il revenir en arrière. Sans doute se demande-t-il pourquoi il a accepté de faire une entorse à sa politique de non-communication. L’homme ne comprend vraiment pas ce qui a pu vous pousser à venir prêter l’oreille à ses propos.
Il faut dire que l’on ne prête jamais innocemment l’oreille à Haruki Murakami. C’est même un organe dangereusement obsessionnel pour lui. Dans chacun de ses romans, les femmes sont tenues par le bout du lobe. Sa fascination auriculaire atteint son summum dans La Course au mouton sauvage, où la petite amie du héros, « mannequin d’oreille », hypnotise les hommes grâce à ses tympans, directement reliés à sa conscience.
« Les oreilles permettent d’accéder à la vérité des êtres, murmure Murakami, d’une voix lente et caverneuse. Si je décrivais vos yeux, votre nez, votre bouche, je serais mal à l’aise, j’aurais l’impression de vous manquer de respect. Mais je me sentirais libre de parler de vos oreilles. Vous ne les avez jamais vues de face, vous ne savez pas à quoi elles ressemblent. Si je les coupais et que je les posais sur la table, vous seriez surprise de voir ce qu’elles révèlent de vous... » Un silence pénétrant ponctue cette menace. Dans la pièce nimbée de soleil se répand l’ombre de David Lynch, amateur d’oreilles éparses dans Blue Velvet. Ce n’est pas pour déplaire à Murakami, qui reconnaît vouer un culte à Twin Peaks et Mulholland Drive.
Le cinéma constitue sa principale source d’inspiration, avec deux auteurs de prédilection : Jean-Luc Godard et François Truffaut, découverts dans les années 60, lorsqu’il était étudiant à l’université Waseda de Tokyo. Du premier, il dit admirer « le sens révolutionnaire et l’art de la déconstruction », à tel point qu’After dark (son dernier livre, non encore traduit en France) n’est autre qu’un pastiche du film Alphaville. Du second, Murakami se sent de plus en plus proche, comme en témoigne Kafka sur le rivage, fortement imprégné du film Les Quatre Cents Coups : « Comme François Truffaut, j’étais un enfant unique, solitaire, inquiet. Je passais mes journées enfermé, avec mes chats et mes livres. Sans lecture, je n’aurais pas survécu à l’ennui atroce de mon existence. J’ai commencé par Le Rouge et le Noir, à 10 ans. Puis les romans russes : Les Frères Karamazov, Guerre et Paix, Crime et Châtiment. Plus c’était gros, mieux c’était ! Quand je les avais finis, je les relisais. La lecture me procurait autant de sensations que si j’avais fait du hors-bord sur une mer agitée. Comme François Truffaut, j’ai tout de suite senti que la fiction était plus belle que la vie. »
Cette capacité à prendre en main sa propre souffrance explique le succès monumental de Haruki Murakami au Japon. En 1987, plus de quatre millions et demi de ses compatriotes (huit millions si l’on compte les éditions poche parues ensuite) ont pleuré en lisant La Ballade de l’impossible, poignant récit de l’amour fou d’un étudiant pour une psychotique internée, sur fond de révolte soixante-huitarde (soixante-neuvarde, au Japon). Depuis, chacun de ses nouveaux livres se vend à plus de deux millions d’exemplaires, phénomène hors du commun dans un pays où l’édition se plaint que les gens ne lisent plus que leurs téléphones portables. Même les mangas sont en perte de vitesse. Voilà quinze ans que les chiffres des ventes de livres s’effondrent. Pour compenser, les éditeurs multiplient les parutions plus que de raison (retranscriptions des blogs d’Internet, et des feuilletons parus dans les quotidiens), mais la durée de vie en librairie se réduit comme peau de chagrin. Seule une poignée d’écrivains japonais a réussi à s’engouffrer dans la brèche ouverte par Haruki Murakami : Yoko Ogawa, Banana Yoshimoto, Hiromi Kawakami, tous experts en dissection de la vie quotidienne, avec une propension à la bizarrerie fantastique.
Accoudé à La Jetée, un bar de Tokyo tenu par une Japonaise énigmatique et cinéphile, un psychiatre confirme cette théorie de l’écrivain compassionnel : « Avant, les auteurs japonais parlaient de la douleur dans un style totalement inaccessible. Pour eux, souffrir était une question purement esthétique. Haruki Murakami est le premier à parler de la difficulté d’être au quotidien, dans une société malade et masochiste. Trente mille personnes se suicident chaque année au Japon. A chacun de mes patients, je conseille la lecture de cet auteur qui peut nous sauver de l’aveuglement national… »
Haruki Murakami a conscience de cette responsabilité qui pèse sur lui et confesse sa profonde inquiétude pour l’avenir de son pays. Si tous ses personnages souffrent de troubles de la mémoire, c’est que l’amnésie collective du Japon le pétrifie. « Contrairement aux Allemands, nous n’avons pas été capables de reconnaître les horreurs que nous avons commises pendant la guerre, avec les Chinois ou les Coréens. Le révisionnisme de nos hommes politiques bloque notre pays, à l’heure où nous devrions nous serrer les coudes avec l’Asie sur un fond culturel commun, comme vous en Europe. »
Haruki Murakami se dit pourtant fondamentalement optimiste. S’il souffre aussi d’amnésie individuelle, un puissant souvenir d’enfance éclaire ses idées noires. A 3 ans, le petit Haruki a chuté dans un canal. Un fort courant l’a emporté, jusqu’à l’entrée d’un égout. « J’allais être happé par ce trou noir terrifiant, et, soudain, la main de ma mère m’a soulevé hors de l’eau. Elle était à la cuisine quand je suis tombé, mais elle a eu la prémonition qu’il m’arrivait quelque chose, et s’est précipitée dehors pour me sauver. Depuis, je crois au retournement des situations les plus désespérées. »
Plus ascète que va-t-en-guerre, Murakami s’oppose en se cloîtrant. Lever à 4 heures du matin. Une heure de course à pied. Une heure de natation. Douze heures d’écriture. Coucher à 9 heures du soir. « Pour écrire plusieurs heures d’affilée, il faut être fort physiquement. J’ai besoin de ce temps de sport où je ne pense à rien. Je suis seul face à mes muscles, mon cœur, mes poumons. Ils me disent que je suis une personne très limitée. Mon imagination ne peut rien pour moi. »
Cet art de la concentration lui vient de son grand-père paternel, prêtre bouddhiste dans un temple de Kyoto, dont la sérénité fervente l’a marqué à jamais. L’homme n’avait qu’un défaut : l’amour du saké. Une nuit d’ivresse, il s’est couché en travers de la voie ferrée. Le tramway lui a roulé dessus. Il est mort coupé en deux. Est-ce pour cela que les héros de Murakami cherchent toujours leur moitié ?
L’auteur dit écouter les défunts depuis toujours. Beaucoup de ses amis se sont suicidés entre 20 et 30 ans. Lorsqu’il écrit, il les sent derrière son épaule. C’est la seule présence qu’il s’autorise, avec celle de sa femme.
Haruki Murakami ne voit jamais personne, la célébrité dans son pays l’a poussé à la solitude la plus rigoureuse, pour continuer son œuvre. « I want to be alone », déclame-t-il de sa voix grave. Comme Greta Garbo ? La question déclenche chez lui un rire inattendu, aussi guttural que tonitruant. Voilà qu’il ne peut plus s’arrêter…
Parfois, ce sont les larmes qui le secouent plus que de raison. Les hommes pleurent beaucoup dans ses livres, « pour se purifier après l’épreuve ». Dans la vie, Haruki Murakami a connu d’intarissables sanglots. Littéralement, son nom signifie « l’arbre de printemps dans le haut du village ». Le saule pleureur dans sa tour d’ivoire… Sa crise de larmes la plus mémorable suivit son entretien avec l’épouse d’un homme tué dans l’attentat au gaz sarin, dans le métro de Tokyo : « Cette femme venait de se marier. Elle était enceinte. Son histoire était tellement triste. Tellement triste… tellement triste… Quand elle m’a parlé, je n’ai pas senti d’émotion particulière. Mais dès que je me suis attelé à l’écriture de son histoire, pour mon livre Underground, le chagrin m’a submergé. J’ai pleuré pendant des jours. »
A la simple évocation de ce souvenir, le visage de Haruki Murakami se creuse de tristesse. Il prend une profonde inspiration, et reste en apnée un long moment, le regard embué de larmes. Puis il lâche un soupir et annonce son intention de commencer un gros livre à l’automne. Pourquoi cette saison ? Question de taux d’humidité. « C’est mathématique. J’ai un seau à l’intérieur de moi. Goutte après goutte, il se remplit. Quand il est à ras bord, je me mets à écrire. Aujourd’hui, je sais qu’il est plein à 80 %. D’après mes calculs, l’inondation sera pour l’automne prochain. »
Marine Landrot (envoyée spéciale au Japon)

A LIRE
de Haruki Murakami. Aux éditions Belfond : Kafka sur le rivage. Aux éditions du Seuil (coll. Points) : La Fin des temps ; La Ballade de l’impossible ; L’éléphant s’évapore ; Chroniques de l’oiseau à ressort ; La Course au mouton sauvage ; Danse, danse, danse. Aux éditions 10/18 : Les Amants du Spoutnik ; Au sud de la frontière, à l’ouest du soleil ; Après le tremblement de terre.
Telerama n° 2948 - 15 Juillet 2006

The Laughing Man
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Message par The Laughing Man »

Bien sûr que non

Merchiiii ;-)
Parfois, ce sont les larmes qui le secouent plus que de raison. Les hommes pleurent beaucoup dans ses livres, « pour se purifier après l’épreuve ». Dans la vie, Haruki Murakami a connu d’intarissables sanglots.
Je trouve cela assez emouvant..... :roll:

Et puis la description de l'auteur me faisait assez penser a celle que je me faisais de l'auteur.... on a l'impression qu'il est lui meme un personnage d'un de ses propres romans.... .
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Arminas
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Message par Arminas »

Rooo je découvre le topic en retard :roll:

Je connais un peu Murakami, en fait je n'ai lu que Kafka sur le rivage. Je l'ai bien apprécié ce livre avec les chats qui parlent, la pluie de poisson ( meuh non je spoil pas là :eek: )

Bref tout ça pour dire que j'apprécie beaucoup cet écrivain et que j'ai hate de lire un autre de ces livres :grin:
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yukiyoruno
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Message par yukiyoruno »

effectivement, j'ai lu l'article de Télerama.
Et Ca me donne envie de lire un des romans d'Haruki Murakami.
Justement, j'ai emprunté un roman intitulé " La course au mouton sauvage"

Aizen, The laughing man, qu'est-ce que ce roman est bien?
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The Laughing Man
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Message par The Laughing Man »

Je ne saurais le dire, bien que je l'ai vu n librairie ( mon ministre des finance et dans le rouge alors pour l'avoir ;-) ).

Mais a premiere vu, enfin d'apres ce dont j'ai pu lire sure, c'est du pure Murakami, alors enjoy ;-) (comment ca, je suis fan de???)
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