La Bête aveugle, d'Edogawa Ranpo

Un peu de repos dans ce monde à 200 km/h. Y a-t-il plus grand plaisir que de lire et relire son livre de chevet ? Parle-nous donc ici de tes coups de coeur littéraires, ainsi que de tes BD & Comics favoris.

Modérateur : Ero-modos

Rilakkuma
La nièce de tonton
Messages : 859
Inscription : mar. 23 août 2005, 19:15

La Bête aveugle, d'Edogawa Ranpo

Message par Rilakkuma »

"L'auteur! l'auteur!" s'exclame David Lodge. L'auteur ? Edogawa Ranpo...

Image

Ce nom dont les idéogrammes signifient littéralement "Flânerie au bord du fleuve Edo", reste assez méconnu dans le milieu littéraire occidental. Pourtant, c'était un grand monsieur, réputé, de la littérature japonaise, même qu'il existe un prix littéraire qui porte son nom décernant chaque année le meilleur thriller policier; même que Gosho Aoyama l'a utilisé pour son "Détective Conan", un manga d'une soixantaine de tomes sur les enquêtes d'un jeune garçon qui, contraint de porter un faux nom, avait opté pour "Edogawa Conan". Pourquoi "contraint" ? Je ne suis pas là pour vous présenter ce manga, débrouillez-vous pour le choper et le lire. Quoi qu'il en soit, ce veinard porte donc le prénom du célèbre écrivain britannique Sir Arthur Conan Doyle, et le nom de famille de l'illustre romancier japonais. Je ferme la parenthèse. Je ne suis pas là pour présenter ce manga, j'vous dis moi.


A propos de ce nom maintenant, il a une consonance familière, n'est-ce pas ? Répétez après moi, Edogawa Ranpo.
E-do-ga-wa Ra-n-po.
EEEdooogawaaa Raannnnpo
Edogawaranpoedogawaranpo

Alors, ouiiii ! Il vient effectivement d'Edgar Allan Poe lorsqu'il est prononcé à la japonaise, il a été inventé à partir de cette phonétique en hommage à cet écrivain que notre auteur admirait beaucoup. Bien vu, les gars!


Image


La Bête aveugle, écrite en 1931, est un roman policier atypique. Le déroulement de l'enquête n'est pas narré, on s'en fiche de ça, c'est sans importance et je peux d'ores et déjà vous livrer l'identité du coupable. C'est la Bête aveugle, le coupable. Comme le dévoile le titre. Etonnant, non ? L'enquête étant par ailleurs inexistante, la narration se focalise uniquement sur la Bête, sur ses crimes perpétrés. Et sur ses victimes, bien entendu. Les malheureuses sont toutes des femmes. Elles ont pour point commun qui les relie entre elles, un corps parfait. Comment la Bête les repère-t'il ? En les massant dans les stations thermales, c'est son métier ça, masseur. La "Bête" est un nom que l'on a affublé à un homme d'une trentaine d'années, doté d'une apparence laide, répulsive, louche, dérangeante, mais si vulnérable, oh, si pitoyable car, vous savez, il ne voit rien, il est aveugle, et "les aveugles, c'est inoffensif" ce que pourraient se dire les gens, et lui, il ne ferait pas de mal à une mouche. Laissez-moi rire. Il est malin, méfiez-vous. Il joue à merveille avec la carte de la vulnérabilité. Pas besoin de chloroforme pour endormir ses victimes, il suffit d'être aveugle pour endormir leur vigilance.

Comme une araignée tapie dans l'ombre, il contrôle un périmètre invisible, ses proies potentielles ne détectent pas le danger et, inévitablement, elles s'approchent de la toile tissée pour elles, ces femmes au corps "parfait" selon sa propre définition de la perfection. La beauté de leur visage ne l'intéresse pas, il s'en moque et on peut le comprendre.
Comme une araignée penchée sur son festin nu (ha, ha), il pose ses pattes tout le long du corps de sa victime, se délecte de cette caresse, de cette sensation qui lui procure un plaisir indescriptible, l'extase proche de l'orgasme, ses mains ayant remplacé la fonction de ses yeux inutilisables, il "voit" leur beauté qu'à travers le toucher. Une beauté tactile.
L'antre de notre araignée, la Bête, en réalité un esthète, est un lieu incroyable, déroutant, fascinant, criard, extravagant, tout ça à la fois car un seul adjectif ne suffirait pas, il faut que je vous le décrive à l'aide de plusieurs extraits du livre. D'abord, il se situe dans le souterrain, il faut emprunter un ascenseur pour y accéder. Cet ascenseur est la voie de reliement entre deux mondes, celui des voyants et du non-voyant.

L'obscurité règne tout en bas. En allumant une petite lampe, voici ce que l'on peut apercevoir à travers les yeux de la femme, involontairement égarée dans ce monde qui lui paraissait (oui, à l'imparfait) hostile.
Traduction de Rose-Marie Makino-Fayolle, édition Picquier.

~~~~~~~~~~

"Ce qui frappait tout d'abord le regard, c'était la confusion des couleurs, inqualifiable, désagréable au plus haut point. Des parasites colorés. Une discordance de teintes. S'il pouvait exister un arrangement de nuances capables de rendre l'homme fou, c'était là sans doute qu'on l'aurait trouvé."


L'impression première au sujet de cette pièce souterraine. Ensuite sa composition:



" Au fur et à mesure que le regard s'habituait, on s'apercevait que toutes ces couleurs n'avaient pas été peintes, mais que la différence venait de ce que les murs ou le sol étaient composés de matériaux hétérogènes engendrant un mélange de teintes invraisemblables et désordonnées. (...)
Bien sûr, toutes ces protubérances et ces cavités pouvaient passer pour des oeuvres d'art. Certains endroits semblaient même avoir été délicatement sculptés à la main, mais ce que nous qualifions de sculpture est complètement différent. Il s'agissait d'un travail de dément, (...)

"Les parties rebondies en forme de bol semblaient faites de caoutchouc rose, et la température semblait provenir d'un dispositif placé derrière elles. N'aurait-on pas dit une poitrine humaine ?
C'était répugnant!
Ces seins, boursouflés et roses comme le visage d'un ivrogne, se pressaient les uns contre les autres en si grand nombre qu'elle en éprouvait des démangeaisons intérieures tellement elle trouvait le spectacle écoeurant. (...)
Aucune de ces poitrines n'avait la même forme. (...) On aurait dit qu'on avait rassemblé là une centaine de femmes pour copier minutieusement leur buste, particulier à chacune. Le résultat est vraiment impressionnant. "



De nombreuses parties du corps humain -exclusivement de femme - des mains, des jambes, des fesses, des bouches, des pieds, sculptées dans divers matériaux, l'ébène, l'ivoire, le métal et j'en passe, toutes de taille différente, étaient enchevêtrées dans les murs, encastrées les unes contres les autres. Seul un esprit aussi fantasque et décalé que celui d'Edogawa Ranpo aurait pu imaginer un tel endroit farfelu, étrange et idéal pour un esthète aveugle qui s'enferme à l'intérieur pendant des mois, nuit et jour, afin de caresser les sculptures. Le problème, c'est que tous ces matériaux coûtent extrêmement chers, il a dépensé toute sa fortune pour se consacrer à son art. C'est pourquoi, il a eu l'idée macabre d'attirer une femme, en chair et en os, dans son atelier peu ordinaire, dans le monde d'en bas. Ainsi, il en est arrivé là. Il capture la femme fantasmée afin de la caresser, la toucher, poser ses mains partout jusqu'à explorer les moindres coins et recoins, à connaître les moindres lignes de son corps par coeur pour finalement, fatalement, se lasser d'elle. La convoitise et le désir font place au dégoût et au mépris. Il commet l'irréparable en se débarrassant de cette femme devenue ennuyeuse, de ce corps beaucoup trop familier. Il la tue. Il la démembre. Il remonte à la surface avec la malheureuse femme en pièces détachées, et il les éparpille dans plusieurs villes. La découverte de chacune d'elles est comique dans le sens le plus noir du terme, on peut aisément les visualiser tellement la mise en scène du burlesque est bien décrite par des phrases courtes et saisissantes. Cette Bête demeure esthète dans ses crimes, il ne fait pas les choses à moitié.

L'extrait qui va suivre est un peu long mais il donne un aperçu correct de l'ambiance macabre teintée d'humour noir. Sur la plage...

~~~~~~~~~~

" Il y en avait aussi qui jouaient dans le sable. Des pères qui s'amusaient à enterrer leur fils. Des jeunes gens tout heureux d'édifier un tas de sable sur les jambes de leur bien-aimée, et qui les consolidaient en tapant dessus. (...) Parmi tous ces groupes, on remarquait un étrange aveugle en maillot de bain à rayures rouges et blanches.
Il était arrivé tôt ce matin, alors que la plage était encore déserte, et n'avait cessé de jouer avec le sable toute la journée, restant jusqu'au soir, bien après que tout le monde fut rentré.
Lui aussi, en dépit de sa laideur, avait une bien aimée.
Allongé auprès d'elle, qui était enterrée dans le sable jusqu'au cou, il ne cessait de lui parler. La jeune femme, son beau corps enfoui dans le sable, ne laissait dépasser que sa tête et ses pieds, qu'elle remuait en riant à gorge déployée.
(...)

Puis vint le soir. Les parasols se fermèrent l'un après l'autre, tandis que les gens partaient en groupe.
L'aveugle lui aussi avait maintenant disparu.
L'immense plage s'étendait sur le soleil couchant, qui n'éclairait plus que trois personnes. Deux d'entre elles, qui en étaient certainement à leur premier rendez-vous, avaient manifestement oublié l'heure de rentrer.
En maillot de bain, assis l'un à côté de l'autre sur un petit monticule, ils discutaient fiévreusement.
- Regarde, il n'y a plus personne. Il ne va pas tarder à faire nuit! s'écria soudain la jeune fille, toute étonnée.
- C'est le soir. Tout le monde est parti, vois-tu. Mais bientôt, les boutiques vont s'allumer derrière nous, et la plage va retrouver sa gaité, tu verras, répondit nonchalamment le jeune homme.
- C'est triste, tu ne trouves pas ? Nous voici tout seuls.
- Oui, tu as raison. Mais il y a quelqu'un d'autre.
- Où ça ?
- Regarde, là-bas sur le sable.
- Tu crois que cette fille soigne ses rhumatismes ? Elle est complètement enterrée dans le sable!
- Tu veux rire! Ce serait la seule façon, au contraire, d'aggraver le mal.
- Alors, elle fait pénitence ? A moins qu'elle n'ait l'intention de se laisser mourir !
- Tu as peut-être raison. Je la surveille depuis cet après-midi, tu sais. Elle n'a pas bougé d'un pouce. C'est un peu bizarre, tu ne crois pas ?
- Si on l'appelait ? Eh, vous, là-bas!
- Ohé!
- Elle ne bouge pas du tout. Tu crois qu'elle est sourde ?
- Tu plaisantes ! C'est inquiétant. Allons voir, il lui est certainement arrivé quelque chose.
Ils se mirent à courir, encore couverts de sable.
C'était la jolie femme venue avec l'aveugle, toujours enterrée dans le sable. Son corps y était entièrement enfoui, et seuls ses pieds et sa tête étaient visibles.
Les deux jeunes gens s'arrêtèrent devant elle et se mirent à l'observer.
- Regarde, on dirait qu'elle dort... Mais c'est bizarre, tu ne trouves pas qu'elle est grande ? Tu vois où sont ses pieds ? Elle est immense. Elle fait au moins sept pieds de haut. Dis, tu te rends compte ? Sept pieds!
La jeune fille, effrayée, poussa un cri avant de s'enfuir à toutes jambes.
Une histoire de revenants, le soir au bord de la mer ?
- Elle ne te mangera pas, idiote! Mais quand même, je trouve ça louche. Dites, madame, vous allez attraper froid! Allez, relevez-vous... Mais... On dirait qu'elle est morte!
Le jeune homme, lui aussi, était prêt à se sauver.
- Dis, que se passe-t-il ?lui criait la jeune fille au loin.
- Va vite chercher quelqu'un. C'est épouvantable, elle est morte!
La jeune fille se précipita aussitôt vers les boutiques pour demander du secours.
Trois ou quatre vigoureux jeunes plagistes accoururent tout d'abord.
- D'où vient cette femme ? Elle est belle!
- En tout cas, il faut la déterrer pour lui venir en aide. Elle n'est peut-être pas encore tout à fait morte!
Ils se mirent à creuser de façon désordonnée. Un trou se forma aussitôt. entre les pieds et la tête de la belle femme.
Au fur et à mesure qu'ils creusaient, les jeunes gens étaient pris d'un sentiment de peur indescriptible. C'est qu'ils avaient beau fouiller le sable, leurs mains ne rencontraient plus rien.
L'un d'eux, incapable de se maîtriser davantage, fit soudain un bond en poussant un cri. Il n'y avait rien dans le sable. Cette belle jeune femme n'avait pas de tronc! Elle avait une tête. Elle avait des pieds. Mais il n'y avait rien entre les deux.
Tous se figèrent, pris de terreur. Ils étaient prêts à fuir au moindre bruit.
Mais les autres arrivaient en renfort.
Dès qu'ils touchèrent à la jolie tête, celle-ci se mit à rouler dans le sable, laissant voir une horrible blessure. Les os du cou pointaient entre les chairs noirâtres. Ils tirèrent sur les pieds, qui n'offrirent aucune résistance. Les jambes étaient coupées à hauteur des genoux.
- Je comprends pourquoi je la trouvais grande. Elle est extensible à l'infini de cette façon!
La plage, tout à l'heure encore si triste dans le crépuscule, était maintenant pleine de monde.
- C'est un crime! murmurait-on en une vague tumultueuse qui déferlait entre les groupes."

~~~~~~~~~~

La Bête rôde toujours. Il est à l'affût de sa prochaine victime. Bon sang, personne ne peut stopper ce fou pervers, ce meurtrier malotru tripoteur? Et la police japonaise? Impuissante. Ni même le Faucheur ? Que ferait l'inspecteur Columbo ? A moins que, peut-être, s'arrêterait-t-il de son plein gré car, à l'instar de Grenouille dans le Parfum de Süskind, il désire ardemment accomplir son but ultime quitte à ôter la vie du corps de ces femmes qu'il aimait tant toucher. Quel est ce but ? On ne le saura que vers la fin. Si vous êtes curieux de la connaître, intrigués par cet univers baroque où l'humour noir enveloppe le macabre, précipitez-vous sur ce livre et les autres romans de l'auteur. Edogawa Ranpo se fera un plaisir de vous accueillir avec un regard malicieux, voire même inquiétant, et de vous conter ses histoires issues de son imaginaire niché, quelque part, entre deux mondes, l'ordinaire et le malsain.
Aizen
Sannin
Messages : 4107
Inscription : lun. 25 juil. 2005, 13:57
Localisation : Mieux vaut mobiliser son intelligence sur des conneries que sa connerie sur des choses intelligentes

Re: La Bête aveugle, d'Edogawa Ranpo

Message par Aizen »

Alors je n'ai pas lu le livre mais... j'ai vu son adaptation cinématographique.
Et j'aimerai connaître les principales différences entre les deux.
Enfin disons plutôt quelles sont les axes choisis par le roman qui ont été omis dans le film (pour plus d'efficacité sans nulle doute).

Déjà le film s'axe autour d'une de ses victimes et le film se place du côté de la jeune femme.
Tout d'abord elle découvre cet homme en train de caresser sa statue.
Ensuite lorsqu'elle appelle son masseur habituel, c'est lui qui vient et qui l'embarque avec le rôle de sa mère.

D'ailleurs est ce que dans le roman, la place de la mère est aussi primordiale que dans le film.
Parce que dans le film, il apparaît clairement que la mère couve son fils, qu'elle refuse de la voir grandir, qu'elle aide à tuer ces femmes, comme on aide son enfant à jouer aux petites voitures. Le meurtrier est finalement placé sous l'angle d'une mètre castratrice qui aide son fils à assouvir son "art". Et l'émancipation et le meurtre de la mère passe par l'amour/ fascination qu'il va avoir pour cette femme qu'il va séquestre (qui va tenter de s'enfuir, qui va même presque réussir à s'enfuir avec l'aide de la mère qui jalouse la place de plus en plus importante que prend cette femme dans le coeur de son fils).

Et le final du film, après donc le suivi de cette relation dans les ténèbres où la femme va, elle aussi, perdre la vue au fur et à mesure. Enfermée dans ce lieu glauque, c'est

SPOIL

Si ma mémoire est bonne, ces deux êtres qui sé découpent mutuellement les chairs, se démembrent petit à petit dans une relation complètement sado-maso (si mes souvenirs sont bons, ils en viennent à se fouetter avant et dans leur quête de plus de sensation, de la recherche du toucher, ils se blessent de plus en plus, donc cela passe par les scarifications pour finir, comme je le mettais plus haut par le découpage progressif de chacun de leurs membres).

Yoruiichi
Chunnin
Messages : 837
Inscription : ven. 16 mars 2007, 15:56
Localisation : Berlin (-15C° dans les grands moment)

Re: La Bête aveugle, d'Edogawa Ranpo

Message par Yoruiichi »

Très belle présentation, et qui donne vraiment envie de lire ce livre.
C'est quoi le film dont tu parles Aizen ?
Bon, je sais ce que je vais demander au Papa Noël moi ^^
Image
Aizen
Sannin
Messages : 4107
Inscription : lun. 25 juil. 2005, 13:57
Localisation : Mieux vaut mobiliser son intelligence sur des conneries que sa connerie sur des choses intelligentes

Re: La Bête aveugle, d'Edogawa Ranpo

Message par Aizen »

Bah... La bête aveugle :hein: :redface: . Réalisé par Yasuzo Masumura

http://www.allocine.fr/film/fichefilm_g ... 27039.html
Rilakkuma
La nièce de tonton
Messages : 859
Inscription : mar. 23 août 2005, 19:15

Re: La Bête aveugle, d'Edogawa Ranpo

Message par Rilakkuma »

Tu l'as en dvd ? ou c'est ton père qui l'as :lol:

La première partie, à savoir la rencontre entre la femme, prénommée Ranko, et l'homme aveugle au musée puis en tant que masseur à son domicile, est la même que celle du roman. Par contre, ce qui diffère complètement, c'est l'apparition de la mère dans ce film alors qu'elle est inexistante dans le livre. :hein:
D'après ce que tu écris et ce que j'en conclue, la "Bête" ne commettra aucune série de crimes ? Ranko sera sa seule captive ?
Alors en effet, le scénario du film s'éloigne beaucoup du livre pour suivre un fil conducteur qui lui est propre. Donc la scène à la plage, on l'a zappée ?
En même temps, si ce bouquin devait être intégralement adapté, il aurait duré des heures tellement les scènes sont prenantes et fascinantes sur le plan visuel.
Je pense que si Ranpo était devenu réalisateur de film, il nous aurait pondu d'excellents thrillers !

SPOIL

Oui, comme ils se sont lassés de toutes ces caresses, ils ont cherché des sensations nouvelles telles que la douleur, la souffrance. D'ailleurs c'est durant ce moment d'excès, mêlé à la lassitude, que la "Bête" lui a coupé le bras avant de la tuer. C'est ce qui a également enclenché la vague de crimes.
Très sado-masochiste, ce Ranpo. Du moins dans ses écrits. En pratique, je ne peux pas me prononcer car je ne sais rien de sa vie sexuelle.

Yoru, le papa Noël t'a sûrement entendu. :bizou:
Image
Aizen
Sannin
Messages : 4107
Inscription : lun. 25 juil. 2005, 13:57
Localisation : Mieux vaut mobiliser son intelligence sur des conneries que sa connerie sur des choses intelligentes

Re: La Bête aveugle, d'Edogawa Ranpo

Message par Aizen »

Non je l'ai vu sur Arte mais ce n'est pas vraiment le sujet.
En fait, dans le film, il y a bien l'univers glauque et clos, avec ces seins, ces membres accolés aux murs.
Mais non la Bête ne tue pas... enfin il ne tue qu'elle.
L'intégralité du film se déroule dans cette pièce (ou presque), en tout cas on est perpétuellement dans l'antre de la Bête.

En fait, si je me fie à ton spoil, et si je comprends bien, le film traite uniquement de la première partie du roman ?
Et finalement de la naissance de la Bête.
sevee
Chunnin
Messages : 607
Inscription : lun. 30 oct. 2006, 21:25
Localisation : sur le forum...

Re: La Bête aveugle, d'Edogawa Ranpo

Message par sevee »

C'est curieux, en commençant la lecture de ta près', j'ai immédiatement pensé au tueur artiste Grenouille dans Le Parfum. :grin: Et arrivée à ta conclu :
A moins que, peut-être, s'arrêterait-t-il de son plein gré car, à l'instar de Grenouille dans le Parfum de Süskind, il désire ardemment accomplir son but ultime quitte à ôter la vie du corps de ces femmes qu'il aimait tant toucher. Quel est ce but ? On ne le saura que vers la fin.
Pouf, la même idée ! Ton livre donne envie d'être lu, par contre j'avais été déçue par un aspect du Parfum, car tu attends pratiquemment tout le livre qu'il se décide enfin à tuer une bonne femme pour fabriquer son parfum. Et il n'a même pas le temps d'accomplir un autre méfait en plus^^
Est-ce que La bête aveugle est du même ordre ? On suit la psychologie d'un personnage dérangé pendant tout le livre, pour une seule scène de "tuerie" ?
Image
Rilakkuma
La nièce de tonton
Messages : 859
Inscription : mar. 23 août 2005, 19:15

Re: La Bête aveugle, d'Edogawa Ranpo

Message par Rilakkuma »

Aizen a écrit :En fait, si je me fie à ton spoil, et si je comprends bien, le film traite uniquement de la première partie du roman ?
Et finalement de la naissance de la Bête.
Hormis l'apparition de la mère, c'est à peu près ça, oui. Dommage que toute l'action du film se déroule dans son antre, les découvertes du corps sont si "comiques".
sevee a écrit :Est-ce que La bête aveugle est du même ordre ? On suit la psychologie d'un personnage dérangé pendant tout le livre, pour une seule scène de "tuerie" ?
C'est complètement différent sur ce plan là. :grin: Le mystère plane autour du personnage jusqu'à ce qu'il rencontre et séquestre sa première victime.
Et dès que sa folie meurtrière s'anime, on ne suit pas vraiment son évolution psychologique, on assiste plutôt à sa rencontre avec ses proies, ce qu'il en fait ensuite, et ce qu'elles (les proies) deviennent après. Ca paraît linéaire mais il y a des rebondissements qui font que ce bouquin est génial, qu'Edogawa Ranpo est, dans le sens loufoque, génial.
Au final, le lecteur devient spectateur de ce qui se passe, juste ça, on ne sait pratiquement rien de la psychologie de la "Bête", on la devine seulement tordue, par ses actes, par ses intentions, mais elle n'est pas aussi développée que celle de Grenouille; on n'entre pas dans les détails et les méandres de la description dont nous abreuve admirablement Suskind (que j'adore), c'est concis et, d'ailleurs, le livre ne comporte que 158 pages.
En fait, comme je l'ai mentionné plus haut dans la présentation, la Bête, c'est une araignée. L'auteur nous place le contexte, nous décrit un peu les personnages (en principe que des femmes) comme il décrirait les mouches qui voletaient ici où là jusqu'à ce qu'elles soient prisonnières de la toile pour laisser apparaitre, enfin, l'araignée. Elle surgit de l'ombre.
Je ne sais pas si j'ai correctement répondu à ta question, sevee. Je n'ai jamais été très structurée dans ma tête. En espérant que tu le liras un jour... :grin:
Image
yukiyoruno
Gennin
Messages : 461
Inscription : jeu. 22 sept. 2005, 19:22
Localisation : Quelque part en France
Contact :

Re: La Bête aveugle, d'Edogawa Ranpo

Message par yukiyoruno »

Un beau article sur cet auteur et ce livre. J'ai lu d' autres romans d'Edogawa Ranpo et je me souviens que j'avais beaucoup apprécié cette lecture.
Pourquoi "je me souviens", bah, j'avais oublié la partie des histoires. J'ai lu "Mirages" mais aussi un autre roman dont je ne me souviens plus.

Ce qu'il écrit n'a rien de tendre, de joyeux. Ca parle des comportements cruels et absurdes de certains humains (aussi bien chez les femmes que chez les hommes).

Bon, je crois que je vais m'arrêter.
"Tuer la Monotonie" la devise des Imprévisibles
Rilakkuma
La nièce de tonton
Messages : 859
Inscription : mar. 23 août 2005, 19:15

Re: La Bête aveugle, d'Edogawa Ranpo

Message par Rilakkuma »

Coucou yukiyoruno!!

ça faisait un bail que je n'avais plus eu le plaisir de tomber sur un de tes post. Je suis très contente que tu l'aies déjà lu, j'ai adoré "Mirage"!
Bon, je crois que je vais m'arrêter.
Pourquoi t'arrêter ? Tu décris si bien les textes d'Edogawa Ranpo. :grin:
Image
yukiyoruno
Gennin
Messages : 461
Inscription : jeu. 22 sept. 2005, 19:22
Localisation : Quelque part en France
Contact :

Re: La Bête aveugle, d'Edogawa Ranpo

Message par yukiyoruno »

Désolée, j'aurai pu développer mais ce jour-là, je n'ai plus rien à raconter.

Je vais faire des efforts pour me souvenir de ses romans/nouvelles.

J'ai bien aimé quelques passages dont un où l'homme (l'inspecteur ?) a découvert les traces des blessures du cou d'une veuve et a compris qu'elle est une sado-masochiste et ... C'est terrible.
Et aussi la course/poursuite haletante pour attraper une femme/artiste qui utilise les peaux de ses victimes pour décorer son salon (c'était dans le Lézard, je crois)

ses romans sont courts à peine de 80-90 pages mais ils sont plutôt solides au niveau du scénario.
"Tuer la Monotonie" la devise des Imprévisibles
istari
Ninja de Légende
Messages : 6419
Inscription : mer. 27 juil. 2005, 18:07
Contact :

Re: La Bête aveugle, d'Edogawa Ranpo

Message par istari »

40 minutes dans une librairie à chercher ce bouquin :rage:
Et je l'ai pas trouvé .. Les boules en 3d dynamiques quoi ...

Jamais vu un libraire aussi con :redface:
"que que c'est le nom de l'auteur ?"
"Edogawa .. cherchez dans la bibliotheque ici et la et la .. "
"zetes sur qu'il a pas de nom de famille ?"
"ah mais tg toi je suis libraire je m'y connais"
"ouai mais tu m'as dis que tu connaissais le bouquin mais tu as été surpris quand je t'ai dis que c'était un policier alors euh .. "

Bon ranpo..ranpo .. faut que je me rappelle de ça :siffle:
Image
Akenehi
Jounin
Messages : 2749
Inscription : mar. 13 déc. 2005, 14:02

Re: La Bête aveugle, d'Edogawa Ranpo

Message par Akenehi »

istari on dirait trop moi en train de tourner dans le virgin à la recherche de ce bouquin excepté la mésaventure du libraire :lol:

Merci Rila pour la présentation, ça m'a donné envie de me plonger dedans !
Quand je le trouve, je l'achète, je le lis et je reviens par ici pour donner mon avis :redface:
Rilakkuma
La nièce de tonton
Messages : 859
Inscription : mar. 23 août 2005, 19:15

Re: La Bête aveugle, d'Edogawa Ranpo

Message par Rilakkuma »

Je suis ravie que ce bouquin vous intéresse, mais étant donné qu'il n'est pas fort connu (le libraire d'istari en témoigne) il est effectivement difficile de le trouver parmi les étagères des grandes librairies. Pour ma part, je l'ai trouvé dans une librairie indépendante, au rayon des "Auteurs asiatiques". Et peut-être qu'il figure également dans les rayons policiers, à la lettre "E". Et si vous avez trouvé d'autres titres du même auteur, n'hésitez pas à le découvrir, surtout si ce que yukiyoruno a écrit au dessus vous intrigue. Il ne coûte pas excessivement cher, à peu près 6euros. Mais c'est un petit bouquin.

-------------------------------------------------
(EDIT)

Je viens de terminer La proie et l'ombre, un très bon livre une fois de plus, et j'adore aussi le titre dont sa réelle signification ne sera dévoilée qu'à la fin.
Image

Voici ce qui est écrit en première page, juste en dessous de la biographie de l'auteur:

Dans la Proie et l'ombre, drame subtil noué de soie et de sang, le narrateur, Ranpo lui-même, tenu sous le charme de l'épouse de la victime, s'attache à élucider le meurtre commis par un autre auteur de romans policiers. Subjugué par la trop belle victime - mais comment ne pas lui pardonner par la trop belle Shizuko qui se laisse si aimablement fouetter !- il va se perdre dans le miroir de ses habiles déductions de romancier, sans vraiment trouver la sortie de ce labyrinthe envoûtant et poisseux où l'érotisme et le crime se rejoignent dans la même exigence esthétique.
Intrigue conduite, comme dans ses autres romans, par une logique implacable, de subtils rebondissements et des mises en scène d'un goût morbide, obsessionnelles même. Edogawa Ranpo apposait à côté de sa signature : " Le monde visible est chimère, la réalité se trouve dans les rêves de la nuit ". On aimerait citer Edgar Allan Poe lui-même écrivant: " Je n'ai pu aimer que là ou la mort mêlait son souffle à celui de la beauté".


Rien à ajouter. :good:
Image
Symphony
Jounin
Messages : 1070
Inscription : jeu. 08 févr. 2007, 01:00
Localisation : Citoyen du monde

Re: La Bête aveugle, d'Edogawa Ranpo

Message par Symphony »

Je l'ai reçu aujourd'hui ^_^

(Oui après m'être énervé contre la plupart des libraires, je l'ai cherché sur le net, et je l'ai trouvé :p)

Dès que je peux je commençe et je viendrai donner mon avis x)
WARNING
This show contains adult humour, strong language, random acts of violence, unrestrained flatulence and scenes of a sexually explicit nature between puppets and puppets which some viewers may find offensive.
Répondre