Kage

Tu débordes d'imagination scénaristique. Tu as imaginé des histoires parallèles à celle de Naruto. Alors asseyons-nous autour d'un feu et raconte-nous ton histoire dans le monde des ninjas.

Modérateur : Ero-modos

Jainas
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Message par Jainas »

Ouiiiiiii ! ma revieweuse préférée !!!

Pour ce qui est de ton analyse de la réaction du conseil, je suis 100% d'accord avec toi, j'ai d'ailleurs pas mal galéré pour trouver un équilibre potable entre l'aspect "coup d'état" et l'aspect "de toute façon le job lui revient en toute logique"...
Leur rejet est tout à fait naturel et leurs craintes totalement justifiables. Mais j'ai eu pas mal de difficultés à les écrire -et ce n'est pas fini ^^- parce que justement trouver l'équilibre entre la frousse que leur inspire Gaara et leur réaction unanime de vieux sclérosés n'était pas évident. (Et c'est sans ans compter ceux qui ne sont pas si sclérosés que ça et qui ont d'autres raison dans leur réaction que le mépris/haine pur et dur...)
Vous aurez d'ailleurs sans doute remarqué que je me suis pas mal amusé avec les noms des Anciens...
Ton analyse est tout à fait juste je pense, mais tu as oublié un aspect : "Kazekage jeune et inexpérimenté = poste d'éminence grise ou de conseiller influent à pourvoir"... hum hum ^^

Quand à la diplomatie façon Gaara... Un peu d'honnèteté ne fait pas de mal non plus, et c'est pour ça qu'il y a des ambassadeurs... Je suppose que les seules négociations hors du village que Gaara aura à mener directement seront de Kage à Kage...
Et puis... vous verrez bien ^^ ;-) :twisted:
(des hommes politiques; à quoi pouvait-on s'attendre d'autre?
tss... mauvaise citoyenne... :mad: Si on pouvait vraiment mettre tous les hommes politiques dans le même panier le monde serait bien mal partit... (il l'est d'ailleurs, à mon humble avis, mais pour d'autres raisons ^^ )
enfin bref.


Sakamoto >
Les différents chapitres ne sont pas intimement liés les un aux autres, c'est plutôt des 'pas' dans la progression, l'évolution de Gaara.
Et oui, elle pourrait se terminer là, mais ce pas ci n'est pas tout à fait fini je pense... ^^ 8-)


Aya >
Moi je ne voyais pas trop d'autre manière pour lui de l'obtenir... Tu le voyais comment ?
Et Gaara n'est pas présomptueux, il est direct. ^^
Il n'est pas habitué à discuter le bout de gras, donc il y va tout de go et il expose ses arguments. ^^ C'est la Gaara-attitude :roll:
Quand à la fic que Kineko... Ce doit être Grenouille des Sable je crois...

Lebibou>
Contente que tu aimes, après tout elle est pour toi cette fic ^^
Sakamoto Julietta
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Message par Sakamoto Julietta »

Bien arakashi! Tu viens de découvrir qu'en politique, tout n'était qu'une question de rapport de force...(bravo) Si on fait une proposition, il faut des cartes à jouer, et un donner sous entend un rendu à plus ou moins lond terme.

Gaara s'amène parce il s'est trouvé un nouveau but, ca m'étonnerait que ce soit dans son caractère d'attendre que de vieux snob se décident pendant des siècles si oui ou non il mérite d'être Kage.

En plus Gaara est fort, il fout les boules à tout le monde et ca doit pas etre facile de le contredire.

Ceci dit ca va beaucoup trop vite ce chapitre (je viens de le relire). Je crois que Gaara aurait plutot tout recommencer à zéro, serait passer genin, chuunin puis jounin (tout ce parcours arsemé d'actes héroique). Il deviendra ainsi l'objet d'admiration de toute la jeunesse de Suna et ensuite il deviendrait Kage.

Mais bon si jainas pense que ca s'est passé comme ca... Je ne vois pourquoi elle aurait tort...
I Think I'm Dumb...(repeat)
Arakasi
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Message par Arakasi »

Jainas a écrit :Ouiiiiiii ! ma revieweuse préférée !!!
:mrgreen:
Moi aussi je t'aime Jainas! :lol:
Quand à la diplomatie façon Gaara... Un peu d'honnèteté ne fait pas de mal non plus, et c'est pour ça qu'il y a des ambassadeurs...
Humph... Il semblerait que l'Histoire ai prouvé que l'honnêteté était loin d'être la premiére qualité demandée à un homme politique.
Mieux vaut souvent avoir à sa tête des hommes habiles et qui sont capables de comprendre les coups tordus des autres, étant tordus eux-même, que des hommes qui seraient juste honnêtes. Ceux là ne durent jamais bien longtemps, et font pârfois plus de mal que de bien...


Sakamoto:
En plus Gaara est fort, il fout les boules à tout le monde et ca doit pas etre facile de le contredire.

Ben oui, bien ce que je disais, dans un état d'esprit pareil, on peut dire qu'il commence sur des bases joliment pourris, le le quoi d'ailleurs? mandat de Gaara ( :???: ).
Dommage que pas un de ces "vieux snobs" ne se soit accroché à ses positions aprés le "coup d'état" de Gaara, il aurait tout de suite gagné mon respect, le vieux crétin...
Gaara s'amène parce il s'est trouvé un nouveau but, ca m'étonnerait que ce soit dans son caractère d'attendre que de vieux snob se décident pendant des siècles si oui ou non il mérite d'être Kage.
En plus Gaara est fort, il fout les boules à tout le monde et ca doit pas etre facile de le contredire.
C'est maigre comme jeu, ça...

Espérons que la suite ne tardera pas trop... :roll:
Sakamoto Julietta
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Message par Sakamoto Julietta »

Ben quand, si tu es le plus fort, et que tu es face a des troullards, ca suffit amplement.

Mais dans le manga, il a le soutient de toute la jeune generation de suna, ce qui a du lui faciliter la tache.
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Message par Jainas »

Je ne m'en souvient pas spécialement, tout ce qui pourait aller dans ce sens là sont les deux kunoïchi en mode "fangirl" de la fin...
Et puis ce respect, il peut l'aquérire en tant que Kazekage aussi (peut-être même plus facilement, parce qu'en tant que Kage, ses efforts et son changement ne peuvent pas passer inaperçues)...

Suna n'est pas tout à fait comme Konoha, c'est un village bien plus âpre, plus dur sous pas mal d'aspects je pense, et les occasions pour Gaara de mettre en application sa nouvelle résolution en tant que Kage sont différentes de celle que Konoha pourrait proposer.
Jainas
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Message par Jainas »

Hop, back from Thailande, avec des écrits plein mon escarcelle...

Et voici pour commencer le (longtemps) attendu nouveau chapitre de Kage.

Et puis vous allez rire les gens (ou pleurer, ça dépend), mais j'ai encore été trop optimiste : ce ne sera pas le dernier chapitre. ^^


Trois


Gaara ouvrit les yeux, lentement, et fixa sa main étendue devant lui, paume tournée vers le ciel immense, comme s’il ne l’avait jamais vue.
« Non, » dit-il. Puis, comme avec l’arrière-pensée que ce n’était peut-être pas assez explicite et qu’une précision était nécessaire : « C’est hors de question. »
Deux pas derrière lui, le souffle de Zakyo Shinji se ralentit une fraction de seconde, avant de reprendre en même rythme lent qu’a l’accoutumée.
C’était un Ancien, mais il avait été un combattant redoutable dans son temps… Et quelques mois auparavant, Gaara aurait très certainement considéré l’infime rupture de rythme comme un signe que l’homme s’apprêtait à attaquer.
Il y aurait évidemment remédié sans même y réfléchir, un pur instinct et une giclée de sable.
Mais à présent il savait que ce n’était sans doute pas le cas –du moins pas ici, en public. Il n’était pas certain, mais il avait plus l’impression que le changement de cadence avait à voir avec le fait que le Conseiller Militaire était exaspéré, et qu’il le cachait de son mieux. On ne s’exaspérait pas après un supérieur hiérarchique (ou du moins on ne le montrait pas) et on ne s’exaspérait certainement pas après Gaara du Désert : Règle de Survie Absolue dans la hiérarchie de Suna. (En même temps, même si on le cachait parfaitement on n’était pas certain de survivre…)
Évidemment, à présent que Gaara du Désert n’était plus seulement le croque-mitaine du village mais aussi -presque- le supérieur hiérarchique absolu… Hé bien l’acclimatation était un peu dure, et on pouvait mettre sur le compte de la pression la légère trépidation dans la respiration de l’homme…
Trépidation qui vibra un instant plus fort lorsqu’un long serpent de silice s’éleva du précipice sablonneux, suivant l’infime mouvement de la paume de son maître, avant de se stabiliser de nouveau.
« Gaara-sama… Soyez raisonnable. C’est une formalité dont vous ne pouvez vous dispenser. » Son ton était parfaitement égal. « Le kazekage se doit de- »
« Je refuse. »
Le visage impassible du jeune homme était partiellement tourné dans sa direction, et les pierres turquoise qui figuraient les pupilles étaient inertes. « Je ne sacrifierais pas inutilement l’un des jounins dont je vais être responsable sous prétexte qu’il s’agit d’une formalité nécessaire. »
La façade calme que tentait de maintenir la respiration se fissura de nouveau –après tout c’était la cinquième fois en deux jours que cette conversation avait lieu… Enfin si on pouvait appeler conversation les monologues des différents anciens qui s’étaient succédés et les réponses le plus souvent monosyllabiques –et toujours négatives- de Gaara.
Et puis pour les Anciens, l’assurance réitérée de sa bonne volonté et le fait que le jeune homme n’ait encore tué personne ne présentait certainement pas la garantie qu’il ne change pas d’avis. Apparemment tout le monde s’attendait à ce qu’il fasse tôt ou tard un bain de sang, histoire de rattraper le temps perdu.
On le traitait donc comme on l’avait toujours traité : comme une bombe à retardement susceptible d’exploser à tout moment si l’on faisait une mauvaise manœuvre –ou pas. Qui pouvait savoir, avec le démon ?
Le respect et la diligence ne cachaient pas la peur.
Elle était présente depuis toujours, autour de Gaara, et les changements de quelques semaines n’avaient certainement pas entamé les réflexes de toute une vie : tant qu’on restait dans les parages de Gaara du Désert subsistait le risque aléatoire –et d’autant plus terrifiant- de finir en bouillie sanglante mélangée au sable : cela n’avait pas changé.
Et étrangement, la peur qu’il suscitait était un ancrage pour Gaara. À peu près le seul sentiment des humains normaux –avec la haine- qu’il soit à même d’identifier, de comprendre et de manipuler. Le seul face auquel il sache vraiment comment réagir.
Et puis une saine dose de peur bien employée était un outil tout à fait efficace, avait-il découvert.

-

Quiconque y passait plus de deux jours s’en rendait vite compte : le désert était un endroit rude, dangereux. Une terre fondamentalement inhospitalière balayée par les vents et écrasée par le soleil, ou la moindre goutte d’eau avait valeur de trésor.
Les gens du Sable étaient à l’image de leur Pays : taciturnes et durs à la peine, capables de tout endurer et de se relever après. Et l’on pouvait reprocher beaucoup de choses aux ninjas de Suna, mais la versatilité n’était pas de celles-là : une fois une décision prise, on s’y tenait.
Et les Anciens avaient peut-être résisté bec et ongle, mais une fois décidé que Gaara du Désert serait le Cinquième Kazekage… Hé bien s’il y avait une chose que l’on pouvait mettre à leur crédit, c’est qu’ils ne perdaient pas de temps.
Après moultes palabres et autres débats enflammés, il avait été décidé que l’intronisation du jeune homme aurait lieu deux mois plus tard. Officiellement le temps d’organiser la cérémonie, de convier les Kage et autres dignitaires, d’informer les villageois sans déclencher une émeute. Le temps également de régler quelques points que les Anciens jugeaient cruciaux : mettre le futur Kazekage au courant de la situation politique, financière et militaires du village –en un mot le former. Officieusement le temps, aussi, d’évaluer à quel point le futur Kazekage de Suna était sensible aux… conseils de ses aînés, et celui de régler quelques écueils juridiques.

Depuis l’endroit ou elle s’était immobilisée derrière lui, en contrebas de la dune et quelques pas en retrait de Zakyo, Ryuusaki repoussa ses voiles de désert pour dégager son visage tatoué.
« Gaara-sama, rien ne dit que vous le tuerez. »
Le jeune homme –si jeune, quatorze ans presque, et bientôt Kazekage- pivota sur lui-même pour lui faire face et une coulée de sable orangé sur le flanc de la dune accompagna le mouvement raide et pourtant gracieux.
« Non. Le risque est trop grand comparé à l’utilité finale. »
« Gaara-sama c’est impossible… » Même la très composée Ryuuzaki commençait à perdre patience. « Pour pouvoir être nommé Kazekage il vous faut posséder le rang de jounin, et pour cela vous devez passer les différentes épreuves comme n’importe qui d’autre. Les jounins que vous affronterez sont des ninjas de Suna, et prêts à mourir comme tel si nécessaire. Ils feront leur devoir. »
Une ride d’expression butée marquait le front du jeune homme, là ou ses sourcils se seraient rejoints –s’il en avait eu. Il croisa les bras par-dessus le baudrier qui maintenait la gourde.
« Ce n’est pas nécessaire. Ils n’ont pas une chance contre moi. »
« Gaara-sa-… »
« Justement, leur mort n’est pas une issue inévitable Gaara-sama, vous pouvez-… »
« S’ils m’attaquent de toute leur force, si. Et comme vous venez de le dire Ryuusaki-san, ce sont des ninjas de Suna : ils feront leur devoir. Ils mettront tout ce qu’ils ont dans le combat. Je n’en attend pas moins d’eux. »
« Mais-… »
« Et ils mourront ou seront grièvement blessés, parce que si je suis… réellement menacé, ou pris par surprise… le Sable réagira en automatique- » Je réagirais en automatique, et ils mourront. Et peut-être que j’aimerais ça. « C’est un risque qui ne vaut pas la peine d’être couru. »
Les deux jounins échangèrent un regard et se renfrognèrent. C’était plus d’explications que Gaara n’en avait avancées depuis le début du ‘débat’ quelques jours auparavant. Mais c’était aussi une référence directe au Sable ; et le Sable de Gaara du Désert était un moyen infaillible de mettre un ninja de Suna mal à l’aise.
Ryuusaki croisa à son tour ses bras sur sa poitrine en un geste qui se voulait austère mais dans lequel une fêlure d’hésitation transparut un instant. Nul autre que Gaara ne savait très bien ou commençait le Sable, et ou s’arrêtait le Démon. C’était un terrain miné sur lequel on ne s’aventurait pas.
Elle échangea un nouveau coup d’œil avec Zakyo, ouvrit la bouche, la referma avec une moue irritée, puis sembla décider qu’elle ne voyait rien à répondre sur le coup.
« Nous transmettrons vos désirs au Conseil, Gaara-sama, » dit-elle finalement.
En silence les deux Anciens se retirèrent, laissant Gaara seul aux portes du désert, scrutant les étendues arides de son regard indéchiffrable.

***

Au final ce fut le Conseil qui céda, quand il fini par devenir évident que sur ce point là la patience et l’obstination du jeune homme étaient aussi vastes et inamovibles que le désert dont il portait le nom. Et ceux des Anciens qui s’inquiétaient de la raison de sa détermination et murmuraient que peut-être il perdait sa touche, que peut-être il répugnait à tuer (ce qui aurait été embarrassant pour un ninja, et inadmissible pour un Kage) se virent rapidement détrompés.
D’abord parce que nulle personne saine d’esprit n’aurait pu confondre les vagues d’énergie sombre qui lui échappaient parfois et la fixité glaçante de son regard pour une quelconque conversion au pacifisme.
Ensuite car quiconque aurait eu le moindre doute aurait aussitôt été détrompé par le massacre qu’il fit lors de la mission.

Contrairement à l’épreuve de force de l’examen chuunin durant lequel les Pays se mesuraient les uns aux autres par Villages et genins interposés et tentaient d'appâter les clients potentiels à coup de jeunes prodiges prometteurs, la promotion au titre de jounin était laissée à l’appréciation des villages. C’était une affaire importante, et entourée de moultes précautions. Après tout on ne dévoilait pas ses meilleures armes et ses secrets à un ennemi potentiel…
Si l’examen du village de la Brume était notoirement très peu encadré, plutôt sanglant, et provoquait régulièrement des plaintes de la part des autres pays pour cause de dommages collatéraux, les quatre autres cités ninja utilisaient un système d’évaluation basé sur des missions réelles et des matchs contre des jounins.
Mais cela ne signifiait pas pour autant qu’ils étaient faciles ou sans danger. L’examen jounin, où qu’il se déroule, avait toujours son lot de blessures plus ou moins graves et parfois de morts, que ce soit du côté des examinateurs ou des participants.
À Suna, un jounin devait soutenir la candidature du chuunin pour qu’il puisse être autorisé à passer l’examen. Ce dernier était séparé en deux parties distinctes. La première consistait en une série de duels contre des jounins du Sable, testant séparément la valeur du combattant et ses réactions face aux techniques de ninjutsu, taïjutsu et genjutsu de haut niveau. La seconde comportait l’accomplissement d’une mission de rang S en solo ou en tant que Capitaine, sous l’observation d’un jounin…

Si à se voir confier une mission S Gaara n’avait émis qu’une froide satisfaction qui fit reculer intérieurement les ninjas endurcies qui étaient présents, il ne modifia pas d’une once sa position quand aux affrontements.
Ou du moins il ne l’aurait pas modifée, si les Anciens à court d’arguments n’avaient décidé de jouer leur va-tout, et fait appel à Temari et Kankuro.

***

Ce fut Kakishi du Sable Gris qui les fit mander et les reçus.
C’était un homme imposant d’une quarantaine d’années, au port droit et au maintien austère. Tout dans sa personne, malgré les robes de notable qu’il portait, hurlait même aux yeux les moins expérimentés que s’il n’était peut-être plus ninja il l’avait forcément été, et un sacrément bon pour ne rien gâcher.
De fait il avait quitté le service actif à l’âge de trente-cinq ans, après une blessure grave, et s’était depuis contenté de postes administratifs et décisionnels. Sa main droite qui reposait sur des genoux était une masse effrayante de tissus cicatriciels dont n’émergeait que trois doigts inertes : il ne pouvait plus former de sceaux.
Pour résumer, Kakishi du Sable Gris était un homme très influent au sein du Conseil, et dangereux par lui-même ; un homme dont il ne valait mieux pas se faire un ennemi.
Et accessoirement c’était également un homme lié par le sang à la lignée des Kazekage, et depuis la mort du Quatrième c’était à lui, leur cousin, qu’était revenue la tête du clan.

Temari entra à genoux dans la pièce austèrement meublée, suivie de près par Kankuro, et s’inclina respectueusement face à lui avant de se redresser avec une raideur non dépourvue de grâce et poser ses mains à plat sur ses cuisses.
C’était peut-être excessif, aux yeux de la loi shinobi ils étaient tous deux des adultes, et leur rang les mettait presque sur un pied d’égalité avec lui, mais son âge, son rôle au sein du conseil et leur lien de parenté exigeait le respect.
« Nous vous saluons cousin. Cela faisait longtemps que nos pistes ne s’étaient croisées. »
« En effet Temari-san, trop longtemps. Mon toit et mon eau sont ceux de mon sang si vous le désirez. »
C’était la formule rituelle de l’hôte qui accueille sa famille. Temari déclina avec une politesse et une déférence égales. Ils étaient installés en ville et ne voulaient pas avoir à imposer leurs horaires exigeants…
En vérité, loger les descendants du Quatrième –même si Gaara avait difficilement l’usage d’une chambre, et que de toute manière il serait bientôt l’heureux occupant des quartiers du Kazekage- confèrerait une aura supplémentaire au pouvoir de leur cousin, et ferait d’eux ses débiteurs. Et puis la famille n’avait jamais été la préoccupation de leur père, et les rapports qu’il avait entretenu avec ses différents parents avaient au mieux été froids et distants, au pire teintés de paranoïa. Les considérations émotionnelles n’entraient guère en compte.
«J’ai cru comprendre que vous aussi passiez l’examen Jounin ? »
« On vous a bien informé mon cousin. Kankuro part dans la soirée, et moi le lendemain. Les Epreuves auront lieu à notre retour… Je ne peux malheureusement vous en dire plus, vous le savez. »
« Bien entendu. Je vois que vous prenez votre tâche à cœur… Vous vous montrez digne de votre sang. »
À la mention de leur père le visage de Kankuro se durci un peu, m ais ce fut à peine perceptible derrière les peintures Kabuki.
« Nous servons notre village, Takishi-san. »
« Je le sais Kakuro-san. C’est pour cela que le conseil voudrait vous confier une mission un peu particulière. Nous voudrions que vous parliez à votre frère, et le convainquiez de participer à l’examen dans son entier. »


Kankuro se renfrogna brutalement, et les mains de Temari se crispèrent sur ses cuisses, froissant le tissu de sa tunique courte. Une fraction de seconde ils songèrent la même chose et atteignirent la même conclusion.
La grande question qui agitait les Anciens était à présent : « jusqu’à quel point le nouveau Kazekage est-il manipulable ? »
Même s’ils avaient été conscient des risques dès le début, ceux du Conseil pensaient avoir malgré tout fait une bonne affaire en nommant un jeune homme inexpérimenté qui aurait forcément besoin de Conseillers Avisés… Et réalisaient un peu tard que ce dernier ne souhaitait absolument pas pourvoir le poste d’Eminence grise.
La crainte latente un instant apaisée revenait… Et ils cherchaient à présent quels pouvaient bien être les leviers de Gaara…
Ils songèrent la même chose, et prirent la même décision.

Le visage de Kankuro se décrispa, et il aboya un éclat de rire dérisif.
« Gaara ne nous écoutera pas, » traduisit Temari sur un ton sec mais surpris qui indiquait que c’était également son point de vue sur la chose, et que seule la conscience de sa propre place la retenait d’imiter son frère cadet face à une suggestion aussi stupide.
« Il est peut-être notre frère, mais cela s’arrête là Takishi-san. Notre parole n’a pas de valeur pour lui. »
« Il a dit… une fois… que le seul lien entre nous était un lien de sang et de haine. Qu’est-ce qui vous pousse à croire que cela ait changé ? »
Takishi soupira très légèrement, et Temari réalisa avec soulagement qu’il avait utilisé cette dernière ressource sans trop y croire –ou alors il jouait remarquablement bien la comédie, ce qui était également fort possible…
Elle n’était pas fille de Kage pour rien, et elle savait parfaitement que s’ils favorisaient en temps normal une autorité implacable et les ordres auxquels nul n’aurait osé désobéir, les Anciens n’étaient pas au-dessus d’un peu de subtilité pour atteindre leurs fins.
« Il a changé, » souligna Takishi d’un ton placide. « D’autres choses ont pu changer également. Et un Kazekage incapable d’écouter ses conseillers n’ira pas bien loin. »
Elle se retint de réajuster sa tunique –ce qui aurait été une preuve de nervosité- et à la place se redressa un peu plus.
Est-ce que Temari et Kankuro avaient une chance d’influencer Gaara ?
Peut-être.
La réalisation était déstabilisante, mais aussi étrangement enivrante.

Le monde était sens dessus dessous depuis que Gaara du Désert avait unilatéralement décidé de devenir Kazekage… Quoique, non. Le monde semblait marcher sur la tête depuis bien avant ça.
Depuis qu’un nabot Konohien orange avait cassé la figure du susmentionné Gaara, en fait… Et l’avait Changé.
Heureusement les ninjas du sable étaient réputés pour leur stoïcisme à toute épreuve. Sinon Temari aurait été tentée de s’assoire par terre (ha non, impossible : elle était déjà assise par terre) et de se prendre la tête entre les mains.
Gaara avait changé, c’était vrai.
Il allait même être Kazekage
Et s’ils pouvaient vraiment influencer ses décisions… Que faire ?

Temari, Kankuro et Gaara étaient les enfants du Quatrième Kazekage de Suna, et d’ici quelques années ils auraient sans doute occupé avec succès des postes non négligeables au sein de la hiérarchie militaire du village…
Bon sang ne saurait mentir disait-on, et s’ils étaient loin de porter leur père dans leur cœur, elle était aussi parfaitement consciente que l’entraînement qu’ils avaient subi et de leurs capacités les avaient toujours destiné à cela.
Des gens plus faibles auraient appelé cela de l’arrogance. Ce n’était que la vision claire de ses forces et ses faiblesses. Même s’il n’était qu’un idiot paresseux affublé d’un sens de la mode déficient, Kankuro était également un marionnettiste hors pair du haut de ses quatorze ans, et elle-même se savait parfaitement capable de vaincre à peu près n’importe qui si le besoin s’en faisait sentir –ou elle n’aurait pas présenté l’examen jounin avec la ferme certitude de le réussir.
Quand à Gaara, il était carrément hors catégorie en s’apprêtant à devenir le plus jeune Kage de l’histoire des cinq Pays.
Ce n’était pas de l’arrogance. Elle était peut-être fille de Kazekage, mais être la sœur aînée de Gaara du Désert lui avait apprit à ne pas s’appuyer sur cela : ce n’était ni son lignage ni un talent non développé qui lui auraient sauvé la vie si Gaara décidait soudain de faire mumuse avec le sable…
La vérité, c’est que pendant la plus grande partie de sa vie, la chose qu’elle avait le plus craint n’avait été ni l’échec, ni l’ennemi, ni Baki-sensei, ni même son père, figure aussi effrayante que toute-puissante. Non, ce qu’elle avait craint, c’était Gaara.
Son petit frère la terrorisait.

Ils avaient été assignés avec Gaara quand celui-ci avait sept ou huit ans, était haut comme quatre kunaï et avait décidé que réduire les gens en pulpe sanglante serait désormais sa raison d’exister.
C’était l’époque ou les tentatives d’assassinat se suivaient avec une régularité mensuelle, et ou Gaara tenait de longues conversations avec le fantôme imbibé de sang de leur mère qui résidait d’après lui dans le sable.
On avait espéré qu’ils auraient une quelconque influence positive sur leur petit frère psychotique, ou quelque chose d’aussi improbable. En ce qui la concernait, Temari estimait presque miraculeux qu’aucun d’entre eux ne se soit fait tuer, et que les stigmates les plus marquants de cette période soit seulement une cicatrice longue comme la main sur la hanche de Kankuro, et la kunoïchi en Temari.

Ils ne savaient pas vraiment ce qui s’était passé entre le nabot de Konoha et Gaara. Cependant les bribes de conversations avec leur frère, son changement et un peu de réflexion leur en donnaient une assez bonne idée, quand bien même cela n’aidait pas vraiment à comprendre.
Et maintenant qu’elle était plus âgée, peut-être un peu plus sage et beaucoup moins effrayée, Temari réalisait à quel point Gaara avait dû souffrir toutes ces années. Il ne s’en rendait probablement pas vraiment compte, et elle n’avait pas le moindre début d’idée de ce qu’elle aurait pu faire pour l’atteindre à cette époque-là –sans finir en engrais pour cactus.
A vrai dire, elle ne savait pas non plus comment l’atteindre à présent. Gaara était sous bien des aspects un mystère, et aussi éloigné que faire ce peut de toute normalité, et ce même selon les critères déjà passablement tordus des ninjas.
Gaara ne serait jamais « normal ». Mais cela dit, il ne concevait sans doute pas ce que « normal » pouvait bien impliquer.
Il y avait trop de sang, de morts, de blessures secrètes et d’ombre. Cela Temari pouvait le dire. Gaara était une créature unique et complexe, endommagée et dangereuse. Et à défaut de trouver la normalité, il cherchait un équilibre interne qu’il était probablement le seul pouvait percevoir.
Durant leur voyage loin de Suna, il avait peu tué, en comparaison d’avant. Il avait porté les coups fatals sans hésitation, mais avec une qualité d’attention différente, comme s’il cherchait à percevoir quelque chose. À s’emparer des bribes de mots d’une voix interne qui lui aurait murmuré des réponses à des questions que nul à par lui-même n’aurait pu comprendre…
En deux occasions il avait… perdu le contrôle, supposait-elle -ou l’avait peut-être volontairement relâché-, et proprement massacré ses adversaires.
Temari et Kankuro avaient prudemment pris le large et laissé leur frère évacuer l’instabilité et l’énergie brute qu’ils avaient senties grandir les jours précédents.
Plus tard Kankuro avait plaisanté, et s’était plaint de ne pas pouvoir s’entraîner si Gaara tuait tous les adversaires tout seul. Il n’avait récolté pour sa peine qu’un coup d’œil inexpressif, mais à la bataille suivante, lui et Temari avaient eu plus que leur part de chuunin déserteurs de la Roche.
Pas de doute, les choses avaient vraiment changées. C’en était un peu effrayant.
Et s’ils pouvaient vraiment influencer Gaara…

« Pardonnez-moi cousin, mais je doute que nous puissions influer sur les décisions de Gaara. Mais même si c’était le cas, je ne pense pas que sur ce… sujet là, il puisse changer d’avis. »
Normalement c’est Temari le porte-parole officieux de la fratrie, mais cette fois Kankuro l’avait devancée avant qu’elle ne sache vraiment quoi répondre. La voix de son frère la décida. Kankuro n’était pas un très bon orateur, même s’il comprenait le jeu tout aussi bien qu’elle. (Et puis il était en train de muer, et sa voix le trahissait de manière embarrassante et alléatoire en passant allègrement trois octaves aux moments les plus inattendus et les plus malvenus…)
Il n'y a plus que nous trois maintenant. Juste nous trois, personne d'autre.
Peut-être que finalement la décision n’est pas si difficile.
Il ne faut pas que le conseil puisse douter de leur loyauté…

« Cousin, me permettez-vous de vous faire part de ma pensée sur le sujet ? »
Takishi paru surprit, mais acquiesça gracieusement.
« Je vous en prie Temari-san, je vous écoute. »
« Merci cousin. Pardonnez moi si ma réflexion est importune… Mais je partage l’avis de Kankuro. Je ne pense pas que Gaara change sa position sur ce sujet. Et je ne pense pas qu’essayer de l’y pousser soit une bonne chose.
Il est… déterminé. Vous le savez… et son contrôle sur lui même n’a plus rien à voir avec ce qu’il était…
Il a décidé que pour être, il doit protéger plutôt que tuer, cousin… Du moins je le crois. Et c’est une chose… précieuse pour le village. Peut-être pourrait-il y avoir une autre solution que les duels ? »

En bon ninja du sable qu’il était, le visage de Takishi ne laissa rien paraître, ne reflétant qu’une impassibilité attentive.
« Vous prenez fort soin de votre frère, Temari-san. »
Aucune hésitation.
« Je sers Suna mon seigneur. Et j’ignore s’il est possible de faire céder Gaara sur ce point, mais je sais que le pousser dans ses retranchements n’apporterait rien de bon. »
C’était une bonne réponse, habile. Déférente comme celle d’une kunoïchi se devait de l’être, mais aussi poliment franche et éludant la question sous-tendue avec élégance. L’éclair mince d’un sourire froid traversa le visage de Takishi et il frotta posément son menton entre deux doigts.
« Je protège donc je suis… C’est intéressant si vous ne vous trompez pas jeune fille. Mais un Kazekage ne doit jamais hésiter à sacrifier la vie de certains au profit de ceux qu’il protège. »
Temari baissa les yeux et ravala tout commentaire inapproprié, toutes ses hésitations et ses doutes, pour ne laisser paraître encore une fois que l’humble déférence que l’homme attendait d’elle et, -malgré elle- des éclaboussures de son caractère bouillonnant
« Je ne me trompe pas cousin. Et je ne doute pas un instant que Gaara du Désert ne soit capable de prendre les décisions militaires nécessaires. »

Takishi paru à la fois contrarié et étrangement satisfait de la légère impertinence.
Cela ne dura pas.
« J’apporterais votre argument au conseil Temari-san. »
Elle s’inclina.
« Nous nous excusons de ne pouvoir vous aider Takishi-san. Nous porterons cependant votre requête à Gaara, mais je crains que toute décision ne soit la sienne. »
Son cousin ne répondit pas, le regard plongé dans le vide.
Il fini finalement par les congédier d’un geste courtois.

***

Kankuro et Temari marchaient côte à côte dans la grande rue de Suna, quasiment déserte à cette heure du jour pour cause de chaleur écrasante.
Temari était silencieuse, mais jouait avec un éventail de papier qu’elle ouvrait et refermait d’un geste sec du poignet, faisant claquer l’armature avec une régularité délibérée. Entre ses mains, le moindre éventail de crépon devenait une arme à craindre.
Le fin papier se déplia devant son visage, dissimulant sa bouche au regard d’éventuels observateurs.
Clac
« Il va falloir jouer subtilement. »

Kankuro n’avait peut-être pas d’éventail, mais comme tout marionnettiste qui se respecte c’était un ventriloque confirmé.
« Je suppose que oui. »
Clac
« Le conseil est à l’affût du moindre de ses faux-pas. »
« Ils tenteront de nous utiliser s’ils pensent que cela peut les aider à avoir le moindre pouvoir sur lui. »
Le sourire de Temari derrière l’éventail se fit soudain froid et prédateur, et la parenté avec Gaara fut évidente l’espace de quelques secondes.
Elle fit volter l’éventail entre ses doigts et le referma deux fois, très vite. Clac, clac
« Qu’ils essayent. Mais dans ce cas ils ont intérêt à être nombreux et armés… »
Puis, soudain plus butée.
« Nous servons Suna et son Kazekage, et eux aussi, ils ne devraient pas l’oublier. »
Kankuro ne répondit pas immédiatement et ils cheminèrent un instant en silence.
« … C’est étrange n’est-ce pas ? »
Clac
Pas besoin de demander quoi. « Oui. Ça l’est. »
« Tu crois que nous pouvons vraiment… ?»
Clac
« Je ne sais pas. Peut-être. Et si c’est le cas… »
« Si c’est le cas, rien. Le conseil a bien assez de chiens comme ça. Tu l’as dit Temari, il ne reste que nous trois. C’est le plus important. »
Clac
« Une famille ? » Temari semblait songeuse. « Peut-être est-ce une raison suffisante. Rester à ses côtés non pas parce que le Conseil le désire, ni même parce qu’il est notre Kazekage... Mais parce que nous pensons qu’il en a besoin. Dans ces conditions… Peut-être que oui. Peut-être qu’il nous écouterait. »
« En même temps tu n’as jamais écouté le moindre conseil venant de moi… »
Temari fit volter son éventail, le récupéra de l’autre main et le referma en le claquant contre son épaule avec un sourire suffisant.
« Ça c’est parce que tu n’es pas fichu de concevoir un plan qui tienne la route, frangin. »
« Dit celle qui s’est fait battre à plate couture par (je cite) “un gringalet amorphe que je pourrais assommer d’une seule main”, si ma mémoire ne me trompe pas… »
L’intonation de Kankuro était une exacte imitation de celle de sa sœur, et Temari s’empourpra, que ce soit de colère ou de gêne.
« Hum… J’admets que j’avais peut-être un peu sous-estimé ce type… Il avait bien plus de ressources qu’il ne le laissait paraître. »
« Peut-être qu’il ne faut pas sous-estimer Gaara non plus. »
Un silence.
« Peut-être. »

Ils avaient atteint le bout de la route, là ou elle se séparait en deux devant le palais du Kazekage.
« Il faut que je rejoigne le QG, » annonça Kakuro d’une voix calme. « Ma mission devrait avoir été choisie à présent. Tu parleras à Gaara ? »
Temari croisa les bras sur sa poitrine, parut sur le point de dire quelque chose, se ravisa.
«Je… le ferais. Kankuro…»
Il hausa les épaules et sourit.
« Ok alors. Ne te laisse pas faire par les vieux croûtons du Conseil. »
Il fit demi-tour avec un salut nonchalant de la main. Temari releva la tête, et sourit à son tour.
« Pas de risque. Ne fait rien de stupide, Kanku. »
« Hé, tu me connais ! »
Temari ne répondit pas par le prévisible “justement.”
« Bonne chance frangin, que le désert te soit favorable.
Et reviens entier.


***

Temari parla effectivement avec Gaara.
Ou plutôt, elle monologua une bonne dizaine de minutes, pendant que son frère cadet l’écoutait avec le même genre d’attention intense habituellement réservée à un scarabée des sables sur sa main, ou à un briefing sur le nouveau schéma de patrouilles frontalières des ninjas de la Roche. Le même genre d’attention qui était auparavant consacré uniquement à ceux se dressant sur son chemin d’existence pour une durée excédant les quatre secondes normalement nécessaires pour les en supprimer.

Elle raconta l’entrevue avec leur cousin, et parla principalement des mécanismes de relations humaines… Si Gaara voulait être un Kazekage efficace, alors il devait savoir éviter de s’aliéner l’intégralité du conseil : en d’autres mots, il devait accepter de faire de temps en temps des compromis.
Le concept intéressa beaucoup Gaara, mais ne le convainquit pas : c’était lent, et dans les cas ou c’était nécessaire, ne permettait pas de prendre les mesures qui s’imposaient.
Et puis s’ils avaient peur de lui, alors pourquoi s’embarrasser avec des compromis ?
Temari soupira, et secoua la tête.
«Qu’ils aient peur de toi ne suffira pas Gaara. Ils seront bien plus efficaces s’ils te soutiennent volontairement. Et puis la peur peut aussi pousser à des actes radicaux… Ils ne soutiendront pas un Kage qui joue les dictateurs omnipotents et n’écoute aucun autre avis que le sien. »
« … Je ne ferais que ce qui est nécessaire pour le bien de Suna. »
Temari pencha la tête, et ses lèvres se pincèrent.

« … Père pensait… que s’allier au Son et trahir l’alliance avec Konoha serait bon pour Suna. »
Elle avait eu un autre exemple sur les lèvres, mais l’avait arrêté à temps. Il pensait que tuer maman pour pouvoir sceller un démon en toi serait une bonne chose pour Suna
Gaara se figea avec une sorte de spasme qui se transmit au sable autour de lui avant de retomber. Ses prunelles turquoise étaient étrécies et une étincelle instable papillonna un instant au fond, avant de mourir.
« Il avait tort. »
« Je sais. Mais lui pensait avoir raison. »
« Et le Conseil l’a soutenu dans cette décision. » C’était, à en croire l’expression minimale de Gaara, une raison plus que suffisante pour oublier toute idée de “compromis” avec les Anciens.
« Parce qu’il a su les convaincre Gaara. »
«… »
« Tu… tu ne peux pas avoir toutes les bonnes idées tout le temps, ou avoir totalement raison à chaque coup Gaara. C’est pour ça qu’il faut savoir écouter les autres, et éventuellement prendre leur avis en compte. »
«… »

Cela signifiait s’appuyer sur quelqu’un d’autre. Le concept était encore plus difficile que celui de compromis, d’une certaine façon… Parce que pour quelqu’un de paranoïaque (et tout à fait satisfait de l’être) comme Gaara, cela signifiait laisser d’autres que lui-même au contrôle de sa survie.
Pire, c’était d’une certaine manière confier ce qu’il avait de plus précieux, sa mission, la protection, à d’autres mains que les siennes.
Pas une seule fois en treize ans il n’avait eut de bonne raison de faire confiance à qui que ce soit. Il n’y avait toujours eu que lui, et il avait bien survécu comme ça. Mieux, c’était la raison pour laquelle il avait survécu.

« Tu n’es pas obligé d’être convaincu, Gaara. Mais dans ce cas, si le sujet est important, explique la raison de ta décision. Et s’il y a des points qui ne te semblent pas importants, alors tu peux les leur concéder… »
Temari se tut, semblant soudain réaliser que la discussion avait tourné en leçon de moral, et surtout que son frère était silencieux depuis cinq bonnes minutes. Ce n’était pas en soit un fait spécialement inhabituel ni a priori porteur de danger immédiat, mais ce n’était pas non plus excessivement réconfortant.
Les nouvelles limites étaient… incertaines, pour Gaara, mais aussi pour ceux qui l’entouraient, et il suffisait encore parfois d’un mot maladroit pour outrepasser les barrières. Gaara était solide, et il en fallait à présent plus que cela pour détruire l’équilibre intérieur et écorner le contrôle de fer que le jeune homme avait sur lui-même… Mais…
Mais l’ombre était là malgré tout, elle faisait partie de Gaara. La faim dévorante du démon, sa propre folie.
L’équilibre était fragile, et ne tenait que parce que Gaara se battait de toutes ses forces pour cela, parce qu’il avait un But.

« Hum… Gaara ? »
« … »
« … »
« … »
« Fais… ce qui te semble le mieux, d’accord ? Mais pense à ce que je t’ai dit. Tu ne peux pas protéger Suna totalement seul. »
Elle avala d’un trait le thé à présent froid qui reposait devant elle sur la table de pierre, puis se tourna à demi pour récupérer l’éventail posé contre le mur à côté d’elle –à porté de main, la paranoïa était apparemment un réflexe familial bien ancré-, et s’en servit comme appuie pour se redresser.
« Je dois y aller. »
Un non-sourcil haussé de manière impassible mais subtilement interrogative l’arrêta.
« J’ai mission demain. »
« … »
« Il faut que je me repose. »
« Ha. »
Elle sourit largement.
« Ne t’inquiète pas pour moi, je vais les réduire en bouillie. »
« … Je ne m’inquiétais pas. »
« … »
« Ne tire pas trop sur ton genou droit, il n’est pas tout a fait remis de la dernière mission. »
« … Comment ? »
« Tu favorises le gauche au bout de quelques heures d’effort. Ca indique à l’ennemi ton point faible. »
« Ha… »
Que Temari soit changée en caillou si ce n’était pas le premier “soit prudente” qui ait jamais franchi les lèvres de Gaara en treize ans…
Elle le fixa un instant comme s’il venait de proclamer sa passion pour Amour, Gloire et Ninjutsu (le feuilleton favoris des kunoïchis de moins de trente ans), puis un lent sourire naquit sur ses lèvres.
« Merci. »


***

Le lendemain matin, aux premières lueurs de l’aube, Gaara se trouvait dans le bureau de Zakyo Shinji, et annonçait impassiblement qu’il avait réfléchit, et qu’il ne participerait pas aux combats de ninjutsu et de Taijutsu –de toute manière tout le monde savait que ça n’aurait strictement servit à rien.
Mais puisque le but final était de prouver sa capacité en tant que ninja à contrer des attaques susceptibles de l’affaiblir, il acceptait de combattre l’expert en genjutsu. Il y avait aussi moins de risque qu’il le tue par inadvertance, puisque le combat pouvait se faire à distance.
C’était son dernier mot, et le Conseil n’avait qu’à s’en satisfaire.

Le Conseil s’en satisfit.


---
TBC

---
Tayuya
Gennin
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Message par Tayuya »

Je n'arrive pas à croire que je n'avais pas commenté cette fic... Pourtant tu peux me faire confiance, dès que tu postes... je fonce lol

C'est très intéressant comme fic et je la trouve très crédible. Je n'avais pas imaginé l'intronisation de Gaara de cette façon mais c'est tout à fait possible. Tu trouves très bien le compromis entre l'autorité mêlée de violence et la "normalité" qui commence à faire son chemin.

Témari est parfaite dans son rôle de grande soeur qui mine de rien prend soin des deux frères. La fille devient une femme assurée, protectrice et elle aussi prend de la graine ^^

Son attitude à elle et Kankuro entre peur et volonté de former autre chose qu'un lien de haine est bien gérée. Superbe la scène du calin d'ailleurs ^^

Et pour finir, le jeu politique avec le conseil. Dans ma vision rose et zoziotée (avec des oiseaux qui chantent), Gaara avait été choisi plus ou moins de plein gré. Mais le coup de savoir si Témari et Kankuro pourraient l'influence est génial ^^ ces vieux croutons là, roooh :lol: quels chieurs

Bref, excellente fic, comme toujours. Je te déclare mon modèle at vitam eternam ;-)
Arakasi
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Message par Arakasi »

Pour cause d'ordi defficient, je n'avais pas encore pu lire la suite de ta fic (et bien d'autres d'ailleurs...). Pas grave, il paraît qu'il faut faire durer le plaisir, ce qui m'a toujours donné un peu de mal, hélas...

Toujours aussi interressant (et superbement écrit mais est-ce vraiment la peine de le répéter? Ah si? vraiment? tss... narcissique va...).

Le jeu de pouvoir entre Gaara et les anciens vaut le coup d'oeil. Chercher à l'influencer via les liens familiaux n'est pas si stupide qu'il n'y parait.
La conversation uni-sens avec Temari était trés bien mené, j'aime bien comment tu traite ce personnage, ses souvenirs liés à Gaara, son affection naissante mélée de crainte...
Les personnages feminims sont dans l'ensemble assez miévre dans Naruto, elle détonne et c'est une bonne chose.

J'ai aprécié la conversation avec la cousin et j'ai bien aimé le cousin tout court (et oui, je m'attache rapidemment aux persos trés secondaires auquels on n'est pas censé s'attacher...).

Chapeau donc^ ^

Et si ce n'est pas indiscret: à quand la suite de Konoha Gaiden?
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Jainas
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Message par Jainas »

c'est indiscrèt (ce qui signifit : pas tout de suite malheureusement... :roll: )
Mais j'ai écrit quelques scènes de plus et plein d'autres trucs ^^


Ho, ouiiiiiiii; des commentaires, encore, ouiii !!!!! (moi, narsissique ? Jamais ^^)
lebibou
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Message par lebibou »

Nom de Diou ! Dire que j'étais à l'origine de cette fic et que je n'avais même pas critiqué ce chapitre.
Honte à moi jusqu'à la treizième génération (Et autre modalité d'usage. Offre limitée dans le temps dans la limite des stocks disponible.)
Bref, une fois passé cette introduction qui a pour but de faire gonfler la review (Rassure toi Jainas, tu n'es pas la seule à avoir du mal à remplir les reviews des bons textes. C'est tellement plus simple de pointer du doigt des défauts que les qualites)

Bien, ce que j'aime beaucoup dans cette fic, ce sont les interaction entre les trois frangins du sable.
Sans blague, ça fait tellement vrai. Temari qui n'arrête pas de balancer des vannes sur Kankuro, terminant ses phrases sur un frangin de bon aloi.
Kankuro, qui se laisse complètement maîtriser par sa grande soeur, contestant plus pour la forme qu'autre chose.
Et Gaara… Que dire sur ce personnage ? Ce qui est dommage dans la manga, c'est qu'au final, on le voit très peu avec d'autres personnages. Un peu au début lorsqu'il est kazekage, mais ensuite combat mort réincarnation etc… Alors en fait, on ne sait pas trop comment il a évolué.
Ton Gaara est très proche de celui de la première saison. A peine plus locace mais très drôle. A ces dépends bien évidemment. (Je ne suis même pas sur que l'humour soit une notion qu'il comprenne)
J'aime beaucoup les Anciens qui s'escriment à dialoguer (pardon, monologuer) avec Gaara. La réponse est toujours la même.
Quand on est Kage, il est vrai qu'il ne faut pas dire oui à tout mais là, Gaara pousse le concept dans ses retranchements.

Un autre point que tu abordes (à vrai dire deux points) et que j'aime bien, c'est la position du clan de Gaara et surtout, Temari.
C'est vrai que dans le manga, il nous est dit que Gaara est le fils du Kazekage et on ne sait absolument rien d'autre. L'idée d'en faire un clan à part entière est bonne et j'aime beaucoup.
Sinon, c'est Temari (j'en ai parlée plus haut je sais) que j'aime beaucoup, car au final, elle tient à la fois le rôle de grande soeur et de mère pour les deux autre.
J'avoue que je me demande bien si quelque part, elle ne tient pas Gaara responsable de la mort de leur mère à tous.

Bon review pas du tout organisée, mais j'essaie d'allonger, d'allonger, ce qui fait que au final, je me retrouve avec un pavé.

See ya (pour Konoha Gaiden j'espère)
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Kazekage le 3e
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Message par Kazekage le 3e »

Yeaaaaaaaaaaaah :bravo: , vraiment trop terrible cet fic , toi etre good ninja du sable :good: , j'espere que tu va continuer , car c'est vraiment une excellente fic , alors bonne continuations ; et SUNA EN FORCE :banane:
Il n'y a pas de mort , il y a la force.
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Message par Jainas »

Mon dieu, ce topic existe encore :shock:

Merci Kazekage. Pour te répondre non, cette fic m'est pas morte -contrairement aux apparences. Le chapitre 4 est plus qu'a moitié écrit mais en stand by pour l'instant et depuis un petit bout de temps pour divers raisons.
Toutefois mon ami me pousse régulièrement à finir cette fic, et j'ai d'ailleurs écrit un peu de Kage pendant les vacances (alors que j'aurais du bosser... tss...) Je pense que je ne posterais rien avant juin pour cause de BTS et de panique pré-orientatoire, (sauf éventuellement le chapitre 10 de Clair-obscure dont il faut que je retouche la scène finale), mais après il viendra ce fichu chapitre 4.

Je pense que celui là sera finalement le dernier, sauf si je décide de céder à l'inmpulsion qui se fait sentir et de m'interresser un peu à Gaara post-Shukaku... Hum... 8-)
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Message par Kazekage le 3e »

Jainas a écrit :Mon dieu, ce topic existe encore :shock:

Merci Kazekage. Pour te répondre non, cette fic m'est pas morte -contrairement aux apparences. Le chapitre 4 est plus qu'a moitié écrit mais en stand by pour l'instant et depuis un petit bout de temps pour divers raisons.
Toutefois mon ami me pousse régulièrement à finir cette fic, et j'ai d'ailleurs écrit un peu de Kage pendant les vacances (alors que j'aurais du bosser... tss...) Je pense que je ne posterais rien avant juin pour cause de BTS et de panique pré-orientatoire, (sauf éventuellement le chapitre 10 de Clair-obscure dont il faut que je retouche la scène finale), mais après il viendra ce fichu chapitre 4.

Je pense que celui là sera finalement le dernier, sauf si je décide de céder à l'inmpulsion qui se fait sentir et de m'interresser un peu à Gaara post-Shukaku... Hum... 8-)
Yeaaaah tu dois continuer :oui: , mais quel torture insoutenable que d'attendre encore et encore :tombe: , je prefere encore me faire torturer par Ibiki Morino ; en tout cas je suis deriere toi , et je t'encourage a ecrire car tu as du talent :good:
Il n'y a pas de mort , il y a la force.
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Re: Kage

Message par Jainas »

note de l'auteur : Hé oui, le chapitre 4 de Kage. Après moulte mois de traversé du désert (haha) le voici finalement. Vous ne l'attendiez plus, rassurez vous je me l'attendais plus non plus, j'avais même mis la fic en hiatus car je ne pensais pas jamais le finir.
Et puis, preuve que tout arrive et que les voies de Thot (divinité tutélaire veillant sur le devenir des scribouilleurs de tout crin) sont impénétrables, il y a quelque semaines j'ai cliqué et ouvert par erreur le document... et soudainement découvert que j'arrivais à poursuivre le chapitre là où je l'avais laissé, que les mots venaient enfin.
Je m'excuse donc de la si longue attente, merci à Sevee qui m'a bêta-lu et intelligemment commenté permettant au chapitre de s'améliorer, et enfin bonne lecture :).

--

Quatre pas

La mission de rang S dura très exactement le temps nécessaire au trajet pour rejoindre les cibles, non loin de la frontière du Vent avec le pays de la Terre.

Gaara s’était vu confier le commandement d’une unité de six jounins dont la plus jeune était une kunoïchi aux traits durs âgée d’au moins cinq ans de plus que lui. Le groupe était également escorté de l’ombre presque invisible du ninja chargé d’observer la mission. Il n’était pas très difficile de faire abstraction de sa présence, parce qu’il la masquait avec une efficacité telle que même Gaara avait du mal à le détecter. Visiblement les Anciens n’avaient pas envoyé n’importe qui pour veiller au déroulement des opérations.
La mission était simple : un groupe des ninjas du Sable qui avaient trahi en faveur du Son lors de l’attaque sur Konoha avaient été repérés. Ils étaient huit à s’être vendus à Orochimaru –ils avaient été plus nombreux, mais Suna avait mis un point d’honneur à laver l’affront dans le sang. Il ne restait normalement qu’eux : trois chuunins de haut niveau, et cinq jounins, dont certains avaient fait partie de l’anbu. Le Son était un ennemi déclaré, mais ces huit là était des cibles spéciales.
Quand les services de renseignement de Suna avaient appris qu’Orochimaru les avait rassemblés pour une mission, l’alerte avait été donnée. Puis il s’était avéré que leur trajet devait brièvement les mener dans une zone désertique proche des frontières de la Terre, un de ces larges pans de terrain plantés de cailloux, à la souveraineté mal définie et que les deux nations ne prenaient même pas la peine de se disputer tant ils étaient pire que stériles. L’hésitation des Anciens avait été brève, avant qu’ils ne décident que le risque minime de déclencher des tensions internationales valait bien la peau des ninjas déserteurs. Le Sable ne plaisantait pas avec les traîtres.

Il fallait les rejoindre, les abattre, et ramener ce qui resterait des corps pour l’exemple. C’est exactement ce que Gaara fit.

Une fois que l’éclaireur eut repéré la position des déserteurs, il déploya ses hommes en filet lâche autour de la zone avec instruction de ne laisser personne s’échapper. Puis, malgré leurs –certes hésitantes- objections, il alla confronter l’ennemi.
Seul.

À partir de là les choses allèrent très vite, et le combat fut aussi bref que vicieux. Il y eut du sang, des cris, et beaucoup de sable.
À leur décharge, la plupart des shinobis renégats firent face, même quand ils eurent identifié la silhouette émergeant de la tempête de sable qui les entoura tout à coup. Si le soudain déchaînement du désert n’avait pas été suffisant, la gourde dans le dos du tout jeune homme et la touffe de mèches cuivrées étaient familières à tout ninja de Suna qui possédait ne serait-ce qu’un quart de cerveau –et d’instinct de conservation. Les deux chuunins qui tentèrent de fuir l’arène tout juste tracée disparurent dans une double gerbe de sable rougie.
Ensuite, le massacre ne dura que quelques minutes, dans un tourbillon de chakra et de roches broyées, et le fracas de tonnes de grains de sables se déversant et se convulsant dans l’air suivant la volonté de Gaara, labourant le terrain.
Les déserteurs étaient des combattants aguerris et rapides, mais le sable était partout, et si l’effet de surprise qui avait envoyé l’un d’eux à terre comme une poupée désarticulée ne dura pas, ils ne furent bientôt plus que quatre, puis trois, puis deux, le tout dans un laps de temps qui aurait fait blêmir n’importe quel ninja.
Le jounin qui avait intelligemment supposé qu’une technique d’eau serait à même d’alourdir le sable et de le rendre bien moins maniable ne survécu pas suffisamment longtemps pour partager sa découverte avec quiconque.

Et quand les cris se turent il ne resta que Gaara, immobile au milieu du paysage dévasté repeint de beige et de sang.
Le chemin du retour se fit dans un silence aussi craintif que respectueux. Ils rallièrent Suna en un temps record, la gêne de la troupe de se trouver en présence de Gaara leur donnant visiblement des ailes.

-

L’épreuve de Genjutsu ne dura pas beaucoup plus longtemps que n’avait duré le combat –la mise à mort- près du pays de la Terre.
La rumeur de la mission ne s’était pas encore répandue, mais c’est malgré tout avec une résignation à la fois fataliste et déterminée que l’expert en genjutsu tiré au sort accepta son rôle, le visage figé en un masque dur qui ne laissait rien paraître.
Cela faisait longtemps que Gaara n’avait plus eu à se battre dans le village, mais depuis ses capacités avaient considérablement augmentées, et nul ne souhaitait prendre le moindre risque. Le duel eut lieu loin des murs de Suna, sur un plateau rocheux dans le désert qui servait traditionnellement de terrain d’entraînement pour les jutsus les plus dévastateurs ou les combats susceptibles de dégénérer –Gaara n’était pas le seul à maîtriser des techniques ayant un fort potentielde ‘réaménagement radical du territoire’.

Le jounin parvint à maintenir le premier genjutsu une quinzaine de secondes –ce qui était remarquable étant donné son adversaire et le fait que les techniques d’illusion marchaient beaucoup moins bien si la cible était prévenue.
Une quinzaine de secondes durant lesquelles Gaara resta immobile, l’expression figée par un terrifiant feu froid.
Toutefois, la relative réussite du genjutsu se vit contrariée par le fait que durant ces précieuses secondes –une éternité en temps ninja-, nul n’aurait pu lui porter le moindre coup… Ce qui était pourtant le but premier d’un genjutsu : déstabiliser l’adversaire, fournir de fausses informations à ses sens pour créer une ouverture.
Mais point d’ouvertures chez Gaara du Désert. Nul n’aurait pu l’approcher à moins de vingt mètres. Il était maître, et sous lui le désert ondulait et se convulsait comme une bête dangereuse, gardant tout assaillant à distance.

Personne ne sut exactement ce que contenait le second genjutsu, mais la vague de chakra brut libéré par la technique de rupture fit un instant tituber tout les ninjas dans un rayon de cent mètres. Tous les jounins étaient autorisés à assister s’ils le désiraient aux épreuves, et malgré la nature fondamentalement non-spectaculaire des techniques d’illusion –tout se passait dans la tête des ninjas qui s’affrontaient- quelques-uns avaient fait le déplacement, poussés par une curiosité probablement un peu morbide.
L’onde atteignit Suna également, et mit les postes de défense avancés en émoi avant qu’un anbu vêtu de brun ne surgisse de nul part et ne fasse annuler le passage au niveau d’alerte supérieur.
Avant même que la décharge de chakra ne soit retombée, le jounin qui avait lancé le genjutsu contempla soudain les yeux verts et froids de Gaara de très –trop- près, et réalisa la seconde suivante qu’il faisait connaissance avec le Sable plus intimement qu’il n’avait jamais envisagé de le faire, quand la mâchoire froide et râpeuse comme du papier de verre rampa sous ses vêtements, enserra ses membres pétrifiés.
« J’ai gagné. » annonça le jeune homme sans une once de satisfaction.
Personne ne put décemment s’opposer à son accession au rang de jounin.

--

Et pendant que les examinateurs et les Anciens s’agitaient en conciliabules sérieux, et après que lui-même ait terminé la rédaction du rapport de mission de son écriture nette, Gaara monta chercher refuge sur le toit du plus haut bâtiment du village, au-dessus de la statue du Troisième Kazekage.
C’est là qu’il se perchait la plupart du temps, la nuit, lorsqu’il n’arpentait pas les toits de Suna ou le plus profond du désert comme une ombre qui faisait frémir les ninjas de garde, et poussait les plus superstitieux à tracer dans l’air un signe sensé repousser le mauvais œil.
De là le regard embrassait le village dans son entier, les rues étroites qui serpentaient entre les bâtisses usées par le sable, l’activité frénétique qui les agitait tant que le soleil était encore clément ; et son désert au-delà des murailles, qui se découpait en un camaïeu d’inégales bandes brunes, grises et jaunes miroitant sous la clarté impitoyable du ciel, son désert s’étendant à perte de vue.
Plus jeune, cette vue l’avait réconforté parce qu’elle lui avait apporté la sensation fugace de l’existence qu’il recherchait. Tout ce paysage qui gisait à ses pieds ne dépendait après tout que de son bon vouloir.
Il était maître du désert, un seul geste de sa main et le sable se dressait selon ses caprices, se faisait arme mortelle, ou tombeau. Il lui suffisait de descendre dans les rues de Suna, et les villageois s’écartaient devant lui avec crainte, mourraient s’il en éprouvait le désir. Leur crainte et l’amour qu’il se portait lui suffisaient, croyait-il.
Cette vision apaisait pour un temps la faim dans sa poitrine, le tourment et la douleur.

Aujourd’hui la solitude, la contemplation de Suna et de l’immensité de son désert l’aidaient à trouver la paix, l’équilibre intérieur. Parce que tout cela, le désert et le village, était sous sa protection. Et qu’il lui appartenait de les défendre au mieux.
La pensée l’aidait à se focaliser, à apaiser la soif de sang, à faire taire la part de lui-même qui ne voulait que tuer, blesser en retour ceux qui le craignaient, s’opposaient à sa volonté. La vision de son village, de son désert, lui permettait de reconstruire le mur de calme et d’indifférence autour de lui, à museler l’ombre et l’instabilité.

Lentement Gaara expira. La sombre satisfaction de la lutte avait en partie soulagée l’avidité qu’avait éveillé le combat à la frontière de la Terre, et la durée du trajet du retour avait été suffisante pour qu’il reprenne totalement le contrôle. Affronter les déserteurs avait été profondément libérateur, pas de retenue, de maîtrise. Cela avait été la possibilité de faire se lever le désert sous lui et de n’écouter que sa puissance sauvage, loin de toute habitation, de toute victime innocente. La possibilité de relâcher les rênes si serrée de l’énergie bouillonnante du démon, de trouver un exutoire à la brûlure du chakra et à la volonté avide qu’il retenait en lui depuis son Choix.
Le combat contre l’expert en genjutsu avait été paradoxalement presque plus difficile. Il avait dû garder son emprise sur lui-même, se retenir de réagir comme il l’aurait fait lors d’un véritable affrontement et de frapper aveuglément toutes ces présences autour de lui qui représentaient des dangers potentiels alors qu’il ne pouvait plus se fier à ses sens…
Il avait eu peur. Non pas pour lui, mais de lui-même. Il avait eu peur de ne pas savoir dominer l’Ancien Gaara, l’enfant effrayé et amoureux de sa propre force qui ne savait que tuer. Qui voulait tuer.
Il avait eu peur de découvrir que tous ces changements, ces efforts, toute sa volonté n’avait servi à rien, et que l’Ancien était plus fort.
Mais non. Il avait réussi. Il avait arrêté le sable, n’avait pas refermé son poing.
Il l’avait voulu pourtant. Une fraction de seconde il avait oublié son But, il n’avait su que l’agitation nerveuse des jounins à distance, la terreur affleurant sous la froide détermination du ninja face à lui. Ils le craignaient, et ils avaient bien raison.
Il avait voulu le faire, leur prouver à quel point leurs peurs étaient fondées. A quel point la haine et la solitude qu’il avait vu dans le genjutsu avaient été justifiées.
Il avait voulu leur prouver qu’ils ne le craignaient pas encore assez, les voir vagir de terreur abjecte devant ce qu’il était. Il avait voulu les supprimer, simplement, d’un geste leur prouver a quel point il était différent d’eux et tellement plus dangereux que tout ce qu’ils pouvaient imaginer…
Sa volonté avait été plus forte.

La méditation aidait, dans une certaine mesure.
Elle n’effaçait pas tout, ni ne résolvait les interrogations et les hésitations qui se bousculaient en lui, mais elle aidait. Elle lui permettait de s’ancrer, se stabiliser. D’organiser ses désirs et les peurs, et de choisir de les ignorer.
Ces heures du jour ou de la nuit passées seul avec lui-même lui étaient nécessaires aussi. Elles permettaient à son corps et à son esprit de se reposer, constituaient le seul substitut possible à ce sommeil dans lequel il ne pouvait se laisser glisser, à cet abandon qu’il ne pouvait se permettre. En temps normal nul ne se risquait à le déranger lorsqu’il allait s’installer dans un coin retiré pour méditer.
Gaara ouvrit les yeux, laissant le monde revenir à lui et apaisant mentalement le Sable qui frémissait dans la gourde. Il n’était plus seul sur le toit.
Le genou droit de Temari était de nouveau bandé, et elle abordait sur la joue une estafilade rougie à demi cicatrisée. L’éventail géant attaché dans son dos et sa tunique étaient gris de poussière. Elle souriait, d’un sourire férocement satisfait.
Les vêtements de Kankuro masquaient tout bandage éventuel, mais la manière inhabituellement raide dont il se mouvait trahissait quelques côtes abîmées. Le sourire sous les peintures Kabuki fraîchement refaites était peut-être un peu plus goguenard, mais tout aussi satisfait que celui de sa sœur.

« On l’a eu, » annonça Temari –et l’air de Kankuro se fit encore plus réjoui.

« Tous les trois. Et d’après ce que j’ai entendu dire tu as dû leur faire une putain de démonstration pendant la mission... » Son ton portait une pointe d’approbation et de curiosité pressante que même Gaara (qui n’était pourtant pas très doué pour le décryptage des humains) perçut –mais c’était peut-être parce qu’il commençait à connaître Kankuro. « Les gars au mess étaient livides. »Si le Sable inquiétait encore Kankuro bien plus qu’il ne voulait bien le montrer, le fait que les autres pâlissent au moindre grain de sable emporté par le vent quand il était question de Gaara l’amusait énormément, pour des raisons que le concerné n’arrivait pas très bien à discerner les rares fois où il s’y essayait, et qu’il avait fini par classer dans la catégorie ‘comportement un peu étrange des humains normaux’.

« Il n’y a rien à raconter. J’ai accompli la mission avec les moyens appropriés. »

« Arrête, tu t’es fait huit ninjas de haut niveau seul. »

Gaara retourna à sa contemplation imperturbable du village sous eux.

« Il était inutile de risquer l’intégrité corporelle d’autres ninjas alors que je pouvais accomplir la mission seul. »

Kankuro eut un soupir exagéré.

« Enfin quand même… On fête ça ? »

Gaara ne daigna même pas répondre à cela.

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Suna faisait les choses à sa façon, vivait selon des horaires réglés sur le désert et la chaleur du soleil.
À Suna les hommes et les femmes étaient aussi âpres que les étendues désertiques qui les entourait, vivaient ses contraintes avec une détermination calme et silencieuse qui pouvait rebuter celui qui ne connaissait pas le village. Suna était tout de sable, de ciel et de vent, et le mélange des trois formait l’âme du village, de même que le feu et les forêts faisaient de Konoha ce qu’elle était…

Mais le village caché du Sable était également, sous bien des aspects, fort semblable à tous les autres villages de ninjas. Et sur ce point spécifique, c’était le cas : il était virtuellement impossible de garder quoi que ce soit secret bien longtemps.
Au bout du premier jour de l’arrivée de Gaara, les rumeurs avaient commencé à circuler.

Cela faisait bientôt un an que Suna était sans Kazekage, et l’agitation soudaine des Anciens ne passa pas inaperçue. Le retour de Gaara du Désert avait entraîné son lot de chuchotements entendus ou hargneux derrière les comptoirs. Untel savait qu’il avait été rappelé par le Conseil pour renforcer la position diplomatique fragilisée du village ; tel autre était persuadé que son arrivée était due à un bras de fer entre les clans ; un autre encore affirmait qu’il avait agi de son propre chef, et qu’il revenait avide de sang frais… Les plus prosaïques haussaient les épaules et murmuraient qu’il était temps que le gamin passe jounin, la difficulté et la nature des missions apaiseraient peut-être ses instincts destructeurs, lui donneraient suffisamment de grain à moudre pour le garder occupé (les plus cyniques haussaient un sourcil à “grain”, et murmuraient “chair”) –et puis qu’on le veuille ou non, c’était quand même un sacré atout militairement parlant.
La seule chose sur laquelle on était vraiment unanime, c’est que personne n’était réellement enthousiaste à la perspective de voir la silhouette hélas familière recommencer à arpenter les rues de la ville.

Puis les rumeurs évoluèrent. Des ninjas qui avaient été en mission dans l’est les six derniers mois rapportèrent que le démon avait changé. Ces discussions-là avaient souvent lieu autour d’un verre, ou d’un feu de camp, et même parmi les jounins les plus expérimentés certains baissaient la voix, comme si parler de cela risquait d’attirer quelque terrible malédiction sur leur tête.
On murmura que Gaara du Désert ne tuait plus, qu’il tuait moins, qu’il était incroyablement plus maîtrisé ; que tout ça c’était des conneries et qu’il était aussi instable et dangereux que jamais… D’une manière générale on accueillit la nouvelle avec une curiosité intéressée et sceptique, et l’on attendit de voir.
Puis il y eu l’examen jounin, et le récit du massacre fit le tour du village, provoquant un mélange silencieux d’admiration et de crainte renforcée chez les shinobis, et un retour de terreur chez les civils les moins endurcis.
C’est à peu près à ce moment que les rumeurs se firent plus précises. Dans les milieux les plus autorisés, l’on sut dieu sait comment que c’était Fuuma, le chef de l’anbu en personne, qui s’était chargé de l’observation de la mission. L’on commença à mettre en lien la frénésie administrative qui semblait avoir gagné les Anciens et les fréquentes convocations de Gaara –ou le fait que des membres du Conseil se déplacent pour lui parler.
Plus prosaïquement il y eut des fuites.
Et moins de deux semaines après l’instant où Temari, Gaara et Kankuro avaient passé les portes de Suna, tout le monde savait que Gaara du Désert -l’enfant-démon, le monstre, le tueur- avait été désigné pour être le Cinquième Kazekage.

La commotion qui frappa Suna ne fut pas immédiatement visible. Il n’y eut pas d’émeutes spontanées, pas de protestations indignées ou horrifiées, et somme toute très peu de tirades alcooliques dans les tavernes du village. Les gens de Suna, autant shinobis que civils, étaient disciplinés et loyaux au pouvoir en place, quel qu’il soit. C’était fondamental, dans un village où la survie quotidienne était profondément liée aux anciennes traditions.
Pour autant la nouvelle ne fut pas acceptée en douceur.
Tant que la nomination resta officieuse –secret de polichinelle…-, la réaction du village le fut tout autant, se limita à des conciliabules agités dans les rues, à des murmures, des signes superstitieux et un silence total dès que se profilait la silhouette aux cheveux de rouille. Mais c’était la seule chose dont on parlait. Envolées les rumeurs sur la vie sexuelle du Tsuchikage, les discussions à mi-voix sur le dernier épisode d’Amour Gloire et Ninjutsu et la manière explosive dont Fuiji avait rembarré Ryoka… Les seuls mots qui revenaient à présent étaient Sabaku no Gaara, monstre, et Kazekage.

Puis, sans que personne ne sache vraiment comment, la nouvelle ne fut plus officieuse, mais officielle, et les cadres supérieurs de l’administration s’agitaient dans tous les sens pour organiser la nomination, prévenir alliés et ennemis que Suna allait de nouveau avoir un Kage.
L’information se propagea comme une traînée de poudre. Malgré sa récente faiblesse, Suna était une force avec laquelle il fallait compter, toujours. Et le nom de Gaara du Désert était loin d’être inconnu. Konoha fut le premier village à recevoir le rouleau ocre et blanc de la main d’un anbu vêtu de brun au visage masqué, puis le pays de l’Eau, et tout les autres…

Silencieux et impassible au cœur de l’agitation qui semblait avoir frappé même les plus composés des Anciens, Gaara passa ces semaines à l’administration de Suna.

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À la seconde même où Kakishi du Sable Gris avait rendue publique la déclaration officielle, Gaara avait fait du bâtiment qui constituait le cœur de Suna sa résidence principale, et s’était mis en devoir d’apprendre tout ce qu’il lui fallait savoir.
Il le fit de la même manière que tout le reste, avec une détermination silencieuse et une concentration excluant totalement toute protestation de la part de qui que ce soit –non pas que les ninjas qui seraient bientôt sous ses ordres aient envisagé une seconde de protester.
Assis à sa table d’étude, il parcourut avec une concentration sans faille le dossier de chaque ninja du village, depuis les jounins au moindre genin, prit connaissance des informations top-secrètes, enregistra sans ciller l’emplacement de chaque cache d’armes et avant-poste secret, écouta les maîtres tacticiens du village lui résumer les différents points d’importance, les interrogea sans merci.
Au bout de trois jours et trois nuits, il devint évident pour les ninjas travaillant à l’administration que le jeune homme ne cesserait sa frénésie d’absorbation d’informations que lorsqu’il n’y aurait plus rien à absorber. Il devint également évident qu’il ne comptait pas se reposer plus de trois ou quatre heures par nuit, mais que Dieu merci il n’attendait pas de ses subordonnées qu’ils en fassent autant. Qu’il était même apparemment disposé à leur laisser deux heures de sommeil supplémentaire par rapport à la durée de repos qu’il s’accordait à lui-même.
À partir du quatrième jour, il entreprit en outre de faire le tour de chaque avant-poste et de chaque fortification défendant le village, apparut aux postes de gardes à toute heure du jour ou de la nuit, et observa des chuunins à moitié somnolents ou au contraire parfaitement alertes –une bonne décharge d’adrénaline faisait réellement des merveilles- se mettre au garde-à-vous avec une rapidité presque surhumaine.
Au sixième jour, les ninjas qui étaient de veille la nuit avaient commencé à s’accoutumer à la présence silencieuse qui hantait les toits et se matérialisait brutalement dans leur dos, seulement annoncée par le crissement léger du sable. Un chuunin manqua toutefois de faire un arrêt cardiaque, et quelques-uns de ses collègues développèrent une forme légère de paranoïa qui s’allégea –un tout petit peu- au bout de quelques jours quand il fut manifeste que la présence de Gaara sur les remparts au sein des ombres nocturnes n’avait rien de spécialement funeste, et qu’il se contentait probablement de faire des rondes de surveillance pour occuper les heures longues du cœur de la nuit.

Il fallu toutefois que Kankuro prenne son petit frère à part et lui fasse remarquer qu’il était censé éviter de traumatiser les pauvres ninjas travaillant pour lui. Ce à quoi Gaara fit remarquer que si la présence de leur futur Kage était suffisante pour les traumatiser, ils faisaient de bien piètres ninjas.
Kankuro éclata de rire sous le regard perplexe de Gaara, et quitta la pièce avec le tas de rouleaux qu’il était venu chercher sous le bras. Il s’immobilisa dans l’embrasure et eut un sourire un peu tordu.
« Si la seule chose qu’ils craignent vraiment est leur Kazekage, on est peut-être pas si mal parti que ça… »

C’était apparemment aussi l’avis du chef de l’ANBU, Fuuma. Il observait la tempête avec un calme froid et réservé qui parlait tout autant de compétence que la manière dont il avait suivi la mission de Gaara à la frontière. Avec Ryuuzaki-san, Baki-san, Kankuro et Temari, il était le seul à ne pas sembler indisposé par l’apparition brusque de Gaara dans son dos ou par les horaires et l’attitude générale du futur Kazekage –même le très composé Kakishi du Sable Gris ne pouvait en dire autant.
C’est lui aussi qui affronta verbalement Gaara quand il fut question d’organiser la cérémonie d’intronisation du Cinquième Kazekage.
Plusieurs complications se présentèrent à ce moment-là. Tout d’abord parce que Gaara ne voyait pas l’intérêt d’une cérémonie d’intronisation publique : les gens savaient qu’il était désormais Kazekage, à quoi bon perdre du temps et de l’argent dans une cérémonie qui ne serait qu’une redite de ce que tout le monde savait déjà ? Il avait beau tourner le problème, il ne percevait pas ce que cela pouvait bien apporter.
Même une fois que les efforts joints de Kankuro et Ryuuzaki-san –agrémenté d’une nouvelle leçon sur les “impacts psychologiques” et la nécessité de “marquer officiellement ce genre d’événement” de la part de Temari- l’eurent convaincu de céder, les problèmes ne faisaient que commencer.

Les Anciens s’étaient contentés de conciliabules outrés quand Gaara avait déclaré qu’il ne voulait pas de cérémonie : c’était une tradition, comment osait-il tenter de s’y déroger, « je vous l’avais bien dit, il ne nous apportera que des ennuis », c’était un acte offensif contre l’âme même du village et ainsi de suite…
Mais quand il spécifia les invitations qu’il voulait faire envoyer pour la cérémonie, le flot de protestations explosa de manière tout à fait exponentielle, avec une véhémence qui n’avait jusque là pas encore été atteinte parmi les Anciens les plus âgés :
« On a jamais vu ça, c’est outrageux, tout simplement ridicule ! »
« Ca va à l’encontre de tous les usages, jamais le Quatrième n’aurait permis une telle chose… »
« C’est une preuve de faiblesse ! Suna va être la risée des nations ! »
« Vraiment, à quoi pense donc Kazekage-sama : inviter l’Hokage et une délégation de Konoha à la cérémonie d’intronisation ? »

Mais s’il s’était montré prêt à compromettre sur d’autres points, Gaara resta totalement inflexible au sujet des invitations, qui en plus de convier dans des termes extrêmement raffinés et formels la toute nouvelle Hokage de Konoha à la cérémonie, suggéraient quelques noms pour les ninjas qui seraient chargés de son escorte. La frustration et l’état de nervosité des Conseillers atteignirent d’ailleurs des niveaux sans précédent lors de discussions échauffées afin de déterminer pourquoi diable le Kazekage avait tenu à inviter spécifiquement le jinchuriki du bijuu Kyuubi, celui-là même qui lui avait fait mordre la poussière presque un an auparavant…
S’ils soutenaient pleinement le rapprochement avec Konoha et adhéraient à l’argumentation de Gaara selon quoi la rencontre des deux Kage nouvellement établis ne pouvait que renforcer leurs positions respectives –sans parler d’affermir le lien diplomatique gravement abîmé par la traîtrise du Quatrième Kazekage-, même les membres les plus progressistes du conseil ne furent pas complètement rassurés par l’assurance formelle de Temari et Kankuro que non, Gaara ne comptait pas défier le jinchuriki dans un combat qui en plus d’être sanguinaire et d’une issue incertaine provoquerait probablement le pire des incidents diplomatiques.
En fait, ils ne furent entièrement rassurés que lorsque la réponse positive de Konoha leur revint, rédigée dans des termes tout aussi exquisément diplomatiques et raffinés que ceux de l’invitation. Et précisant que si les ninjas suggérés par le Kazekage se feraient un plaisir d’être du voyage, Uzumaki Naruto n’était malheureusement pas disponible.
Le Conseil émit un soupir collectif de soulagement, les Anciens rétifs admirent entre leurs dents que la venue de l’Hokage n’était finalement pas une chose si terrible (du moins comparativement parlant), et chacun se remit à l’organisation frénétique des festivités –sauf Gaara, mais tout le monde convint que c’était mieux ainsi, parce qu’il n’avait jamais cessé de s’organiser, et que de toute manière personne n’avait spécialement envie de voir la moindre frénésie chez lui.

Et, sur une note moins sérieuse, Kankuro passa un après-midi entier à rire dans sa barbe et à éviter les éventails de Temari lorsqu’il apprit que Nara Shikamaru ferait parti de la délégation de Konoha.

fin

--

Et voilà, c'est la fin, mais en vrai, c'est aussi le début. :)

Ce chapitre est le dernier. Il y a du potentiel pour raconter plus de choses, je le sais, mais l'envie me manque, et Gaara ne me parle plus trop... C'est déjà un miracle que j'ai fini par achever celui-là après un an de hiatus dessus. J'avais un moment envisagé un chapitre de plus sur l'après Akatsuki, mais il y a peu de chance que ça ce fasse, j'ai déjà du mal à avancer Konoha Gaiden et Clair Obscur sans pour en plus me relancer dans quelque chose d'autre. J'espère que cette exploration du personnage de Gaara et des étapes qui l'ont menées sous le chapeu de Kazekage vous aura plu.

Reviews ?
lebibou
Sannin
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Localisation : Qui t'as dis que j'existais ?

Re: Kage

Message par lebibou »

J'aime :-)

....

Comment ça se n'est pas une review suffisante ? Pourtant, ça résume parfaitement ce que je pense. Et pourquoi est-ce que je devrais développer ?
Parce que... c'est moi qui... qui quoi ?... moi qui suis à l'origine de cette fic ?
Et merde, le pire que c'est un bon argument ce machin là. Bon, pour ceux qui suivent cette fic et qui n'en connaissent pas sa genèse, il faut savoir qu'au départ, c'est moi qui avait demandé à Jainas une fic sur la nomination de Gaara en tant que Kazekage, après avoir fait un OS sur un truc qu'elle aimait bien. (J'ai oublié quoi par contre. Jainas, si tu t'en souviens.)
Bon, c'est bien ça, ça permet de meubler.


Bon blague à part, j'aime beaucoup cette fic. Parce que, comme à ton habitude, tu sais y faire en psychologie et pour montrer l'évolution d'un personnage au fil du temps.
Tu avais déjà exceller dans cet art avec Marche dans les ténèbres, tu viens juste de confirmer ton talent.
J'aime beaucoup comment on passe d'un Gaara avide de destruction à un Gaara beaucoup plus posé. Ce qui est assez intéressant, c'est que j'ai l'impression qu'au final, il n'a pas tellement bouger que ça. Certes, il tue moins de gens, le fait avec un peu plus de discernement etc... mais ses mécanismes restent sensiblement les même. Ce qui change réellement, c'est qu'il écoute les autres, et aussi qu'il cherche à contrôler la bête.

J'aime beaucoup aussi, en vrac,

- l'aspect inadapté social et profondément pragmatique de Gaara (
Tout d’abord parce que Gaara ne voyait pas l’intérêt d’une cérémonie d’intronisation publique : les gens savaient qu’il était désormais Kazekage, à quoi bon perdre du temps et de l’argent dans une cérémonie qui ne serait qu’une redite de ce que tout le monde savait déjà ? Il avait beau tourner le problème, il ne percevait pas ce que cela pouvait bien apporter.
) <=J'adore.

- la méditation, substitut du sommeil recommandé par Gaara. Tiens à ce propos, depuis qu'il n'a plus son démon, il dort ou pas ?

- Kankuro et Temari, le frangin et la frangine, véritable bouée de secours affective de Gaara. On y croit, il va finir par y croire au sentiment. D'ailleurs, je regrette qu'on ne les voit pas plus dans ce chapitre (même si la fin est exquise).

Bon, en tout cas, bravo. Je suis très content de cette fic et très content de l'avoir lu.
Vivement la suite pour d'autre fic. ^^
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