Session cinéma de
qualitay - 'tain, comment ça fait
zizir.
Ugly d'Anurag Kashyap :
Le pitch d'
Ugly est simple.
Kali, une gamine de dix ans dont les parents sont séparés disparaît soudainement dans une rue de Bombay, alors qu'elle est sous la garde de son père,
Rahul. Autant le dire de suite,
Ugly fait figure d'uppercut en pleine tête. Un tel sujet, c'est l'occasion rêvée pour
Kashyap de décortiquer un univers -
Bombay -, ses institutions, ses problèmes sociaux, ses mœurs, sa corruption.
Le résultat est impressionnant. C'est le genre de films qui te fait dire que
Greene se trompait pas trop quand il disait que
"nous avons tous une écharde de glace plantée dans le coeur." Ugly, ça t'anéanti, ça te pulvérise tout espoir quant à la bonté de l'être humain. Plus les jours passent, plus l'enquête avance et plus tu sombres devant tant d'horreur et de noirceur - faut dire que le rythme, lancinant et répétitif, aide pas à remonter la tête à la surface. J'étais scotché du premier au dernier plan - et p'tain, ce premier plan, ça annonce la couleur. On aurait pas pu trouver meilleur titre pour
Ugly tellement c'est
ugly.
The Homesman de Tommy Lee Jones :
Le nouveau film de
Tommy Lee Jones à la gueule d'un
western, mais c'est pas vraiment un
western. Plutôt un
western des grandes plaines. M'enfin ça change pas grand chose en définitive. Le film est bon, c'est là l'essentiel. D'ailleurs,
The Homesman aurait pu chopper le titre d'un des albums de
Blueberry,
La Longue Marche. Parce qu'au final,
The Homesman, c'est ça : une marche funèbre étrange et déroutante, faite de nombreuses ruptures de tons.
Le film est lent, très lent. Peu riche en action également, mais il a quelque chose d'incroyablement hypnotique. On rigole plus d'une fois, on est bouleversé plus d'une fois, on est mal à l'aise plus d'une fois. Faut pas se fier à la facture classique du film - dès le générique, illustré par de magnifiques paysages -,
The Homesman étant tout sauf classique.
C'était beau. Vraiment.
L'île de Giovanni de Mizuho Nishikubo :
Je pourrais commencer comme j'ai conclu, juste au dessus.
"C'était beau. Vraiment." Parce que ça l'était. Après l'excellent
Lettre à Momo,
I.G. balance une nouvelle fois la purée avec
L'île de Giovanni, histoire d'enfants - et par extension, d'habitants - vivants sur l'île de
Shikotan, laquelle a été annexé à l'
U.R.S.S. après 1945. Au cœur du film, le souvenir. Celui du quotidien de deux frères,
Junpei et
Kanta, et des conséquences de la fin de la guerre sur leur famille.
Si
L'île de Giovanni est traversé de scènes terrassantes et tragiques - par exemple, celle de l'embarquement, lors du retour au Japon -, il n'en reste pas moins remarquablement optimiste - et ponctué de superbes séquences oniriques. Film de
coeur, film d'
espoir, il est une invitation à la compréhension de l'autre et à la paix. Une chronique douce-amer graphiquement époustouflante, précieuse et à mettre en toutes les mains.
White God de Kornel Mundruczo :
À l'heure actuelle, l''une des plus grosses, sinon la plus grosse claque cinématographique de l'année. Palimpseste de genres,
White God est un époustouflant moment de cinéma, viscéral, émouvant, déchirant et perturbant. Sous la forme initiale d'un film d'anticipation, sorte de conte en prise direct avec notre réalité quotidienne, le réalisateur,
Mundruczo, livre un film politique à la fois et cérébral et terriblement efficace d’instantanéité. Pour dire les choses simplement,
White God, c'est un peu
La Planète des Singes, façon
Les Origines, mais juste cent coudées au dessus - et avec des chiens à la place des singes. Y a un peu de
Babe 2 dedans également,
Mundruczo et
Miller ayant tout deux cette capacité à toucher à l’universalité et à ne jamais être pontifiant.
Ça me gène un peu, mais j'arrive pas encore à trouver le moindre défaut au film. Pour la bonne raison que tout me semble fonctionner. L'histoire, sombre et tragique, met en scène la souffrance et la spirale infernale dans laquelle sombrent deux êtres, une jeune fille (
Lili) et un chien (
Hagen.)
Nan mais tsé, dès l'introduction - qui marque en réalité de début du troisième et dernier acte du film - j'avais la mâchoire qui pendait. Que ce soit dans le mélange incroyable des genres, la mise en scène, la musique, le jeu des acteurs, tout fonctionne. Y a de ces images dans
White God,
p'tain...