Merci à tous pour les reviews... :D
Fpnj, comme certains disent céan, non? XD
Gné ?
Et sans plus attendre... la suite :) (ou plutôt le début)
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Chapitre 1 : Mailhoe
Debout à la fenêtre de son bureau, la femme vit disparaître l'équipe 7 derrière les arbres au-delà des portes de Konoha, mais continua à fixer le point où elle les avait perdu de vue longtemps après leur départ. Ses deux mains étaient posées à plat sur la rambarde, et elle avait l'air plus fatiguée que jamais.
"Ne t'inquiète pas Princesse, tout finira par s'arranger."
Elle se tourna, et fit face à l'homme profondément enfoncé –voir même avachi, n'ayons pas peur des mots- dans l'un des sièges réservés aux invités de marque.
A lieu de le réprimander comme elle l'aurait fait à l'accoutumée, elle secoua la tête et vint se glisser dans son propre siège, de l'autre côté du bureau.
"Je ne sais pas Jiraya… Des fois j'en doute."
D'un geste machinal elle remit en place quelques parchemins, et ajusta les tas avec un soin distrait.
- Tu es aussi conscient que moi que les envoyer à Mailhoe à cette période de l'année signifie très probablement qu'ils vont y rester coincé une bonne partie de l'hiver. Les premières neiges ne sont plus loin, et une fois que les cols seront bloqués dans une ou deux semaines au maximum, le retour deviendra extrêmement difficile… L'hiver là-bas est beaucoup plus rude qu'ici…" Elle soupira en se massant les tempes. "Les envoyer sur la frontière nord-est, c'est quasiment priver Sakura et Naruto de toute chance de retrouver Sasuke…"
En silence l'ermite se leva et contourna le bureau. Il se plaça derrière elle, et elle ne protesta pas quand il commença à lui masser les épaules.
"Je sais. Je suis bien content de t'avoir refilé le boulot. Les Anciens du Conseil sont des vieux débris bornés et frileux qui ne comprennent rien à rien…"
Elle secoua la tête d'un air las.
"Leur première priorité est de préserver le village. Et ils ont peur. Peur du pouvoir de Naruto, peur qu'il en perde le contrôle, peur d'en perdre le contrôle, qu'on l'utilise contre eux… Et avec tout ceux qui sont après lui, l'Akatsuki en chasse, et le sceau qui faiblit, on peut les comprendre…"
Jiraya renifla avec dédain.
"Et c'est sans compter cette vipère de Danzou qui se sert de cette peur pour assoire son pouvoir… D’ailleurs, des nouvelles du pays de l’Eau ?"
"Non. Juste de vagues promesses de neutralité, et un refus total de prendre ouvertement partie."
"En gros soit ils ont passé des accords secrets avec Orochimaru et ils préfèrent qu’on ne soit pas au courant, soit ils ont les jetons…"
Tsunade haussa vaguement les épaules.
"Tu as vu le Tsuchikage plus récemment que moi… Cela dit l’épisode avec Kazekage le Quatrième devrait lui inspirer la méfiance dans ses tractations avec le Son, c’est un homme dur mais prudent… J’ose espérer que la neutralité de la Brume est simplement d’une tactique diplomatique pour préserver le pays de l’Eau…"
"Ca, plus le fait qu'on a toujours aucune nouvelle de Lui et de l'Uchiha… Du coup ce fichu va t'en guerre de Danzou a beau jeu. C'est lui qui a insisté pour éloigner Naruto, n'est ce pas ?"
"Le laisser partir à la recherche de son équipier, c'est l'envoyer droit dans les filets d'Orochimaru, tu le sais aussi bien que moi... Tu as vu comment ça s'est terminé la dernière fois… Si Yamato-san n'avait pas été là…"
Jiraya acquiesça en silence et continua à lui malaxer les épaules, effaçant un peu plus la tension qui l'habitait avant de répondre.
"Oui… Le contrôle est son plus gros problème. En temps normal il maîtrise ses capacités et résiste aux mirages que lui offre le Kyuubi. Mais dès qu'Uchiha est concerné, tout ce qu'il arrive à endiguer d'habitude lui échappe, et ça le rend quasi incontrôlable… Cela dit il a fait des progrès dans ce domaine ces derniers temps…"
Tsunade soupira, et se laissa aller à s’appuyer contre le dossier du fauteuil.
"Je l’espère. J'ai pu réussir à arracher un compromis au Conseil… Si jamais on a des nouvelles, l'équipe de Kakashi sera immédiatement prévenue et autorisée à rejoindre la troupe d'anbus…
Mais sinon, si le moment passe… Il faudra prendre des mesures pour l'abattre avec son nouveau corps. Il sera bien trop dangereux. Il… il est déjà bien trop dangereux. Konoha n'aurait pas du le laisser vivre si longtemps… Ce fut l'erreur du Professeur, et il l'a payée de sa vie."
"Ca a été mon erreur aussi, tu sais. J'étais encore là à l'époque, et quand j'en ai eu l'occasion… moi aussi je l'ai laissé s'échapper. Parce qu'il est… qu'il était… le dernier, le seul qui restait à ce moment là, n'est ce pas ?"
Tsunade ferma les yeux, et laissa les mains de son ancien équipier s'attaquer aux nœuds dans sa nuque.
"Tu penses… Tu penses que nous le revoyons trop en lui ? Que ça brouille notre appréciation de la situation ?"
Les mains de Jiraya s'arrêtèrent un instant, avant de reprendre leur lent travail.
"… J'aurais voulu éviter au gamin d'avoir à souffrir ça. Parce qu'il souffrira forcément. L'Uchiha lui ressemble tellement sous certains côtés… Et parfois… Parfois je me dis que s'il arrive à le ramener… ce serait un peu comme si nous avions une seconde chance. Comme si ça pourrait effacer un peu du mal qu'il a commis."
Un long silence passa, puis Tsunade souffla.
"Il me manque, parfois. Je le hais de toute mon âme pour ses crimes, et je n’ai qu’une envie, c’est le voir mort… mais il me manque."
Jiraya resta silencieux, et au moment ou elle pensait qu'il ne répondrait plus, son front vint s'appuyer sur l'arrière de sa tête et les mèches grises se mêlèrent à ses cheveux blonds.
"Je sais Princesse. A moi aussi. Il me manque."
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Cette mission, décida Naruto au bout de la troisième heure de marche, puait du début à la fin.
D'abord, elle n'avait pas l'air intéressante pour un sou : d'après le peu qu'il avait compris –ou plutôt écouté- de l'ordre de mission, on avait relevé quelques mouvement inhabituels du côté Riz de la frontière (mais ce n'était même pas des ninjas du Son, plus probablement des groupes de bandits de grand chemin). La kunoïchi en charge de l'avant-poste était enceinte –
pffff- et avait souhaité revenir accoucher à Konoha. Ca plus le départ simultané à la retraite de deux ninja laissait l'avant poste temporairement dégarnit en attendant les prochaines mutations au printemps, et du coup on les envoyait eux voir de quoi il retournait exactement, et éventuellement y mettre bon ordre.
Bref, ce n'était pas une mission
passionnante.
Naruto voulait de l'action ! Du frisson et des combats dignes de ce nom ! Des explosions titanesques et des occasions de mettre ses nouvelles techniques à l'épreuve ! Rien de tout cela n'avait l'air du niveau d'un futur Hokage, ni d'une kunoïchi talentueuse comme Sakura-chan, et encore moins du niveau du Sharingan Kakashi ! Même pour cet emmerdeur de Sai, ça ressemblait à de la sous affectation (rien que le fait qu'il l'admette en était la preuve !)
Et puis le temps passé à accomplir cette fichu mission était du temps qu'il ne passerait pas à chercher Sasuke, et malgré la promesse de la Vieille de les avertir à la moindre nouvelle, c'était un inconvénient plus que majeur aux yeux de Naruto. Evidemment pour le convaincre elle avait fait miroiter la possibilité de récupérer des infos auprès d'un ninja du Son s'ils en rencontraient près de la frontière, mais elle-même n'avait pas paru excessivement convaincue.
Pas de réel défit, perte de temps et d'énergie –surtout de temps d'ailleurs…- : en un mot comme en cent, cette mission puait.
Enfin bon, d'un autre côté il était au moins autorisé à quitter Konoha.
Ce n'est pas qu'il n'aimait pas son village, mais après trois ans passés sur les routes en compagnie d'Ero-Senin, il supportait mal de rester cloîtré à faire ses missions au village, sans avoir l'occasion de s'en éloigner un peu…
L'air était pur et frais, presque piquant, et tandis qu'ils bondissaient d'arbre en arbre, que chaque pas les éloignait un peu plus des murs de Konoha, il se sentait l'envie d'accélérer et de distancer les autres, juste pour sentir le vent gifler son visage. Pour goûter à la vivifiante sensation de liberté…
Courir dans la forêt dépeuplée, droit devant toi, sans jamais t'arrêter. Sans jamais personne pour t'arrêter.
Libre.
Libre et puissant. Débarrassé de ces peurs, de ces doutes et de ces hésitations. Juste toi et la certitude que tu atteindras le but que tu t'es fixé…
Toi et ce sentiment de joie sauvage qui monte, cette exaltation primaire de la course qui ne s'arrête jamais. De cette force de tes muscles qui te portent toujours plus loin, toujours plus proche de lui…
L'odeur acidulée des pins de Konoha, les fragrances des animaux dont les traces s'éloignent de ton chemin, l'odeur de tes compagnons qui te suivent, te talonnent. L'odeur du rival –mais pas vraiment, ce n'est pas lui, ce n'est pas le bon…-,
l'odeur de la jeune femelle, celle du mâle alpha –tu le suit parce qu'il est plus expérimenté, encore...
Tu sens toutes ces odeurs, et elles t'enivrent, presque autant que la course elle-même, et-
Et Naruto sortit de sa transe, et cligna plusieurs fois des yeux avant de réaliser ou il était. A sa droite Sai lui jeta un regard désintéressé, avant de bondir de nouveau, et derrière il pouvait sentir Sakura et Kakashi-sensei. Ils n'avaient pas arrêté leur progression… -
courir…- C'était juste lui qui s'était… S'était quoi ? Perdu ? Egaré dans un rêve éveillé ? Il pouvait toujours sentir l'odeur douce de Sakura -
celle à la fourrure rose- mêlée à celle plus âcre de la sueur, et Sai sentait le charbon de bois –le 'fusain' comme il appelait ça…
Il avait commencé à percevoir certaines choses avec une acuité déconcertante quelques mois auparavant, ou peut-être même alors qu'il était encore avec Ero-senin, il n'y avait aucun moyen d'être réellement sûr...
Au début il n'y avait pas prêté une attention particulière, parce que cela arrivait en combat, et qu'alors tout allait trop vite pour qu'il réalise vraiment…
Puis un jour il avait réalisé qu'il pouvait identifier Sai à l'odeur de son shampoing 'inodore spécial ninja', réalisé que -parfois, pas tout le temps- il pouvait savoir rien qu'a son odeur si Kakashi-sensei lisait réellement son bouquin porno comme il prétendait le faire, ou si il se contentait de les surveiller en tournant une page de temps en temps pour faire illusion…
Après avoir minutieusement examiné le sceau et tenu d'interminables conciliabules à voix basse, Ero-senin et la vieille Tsunade avaient conclu –ce dont il s'était un peu douté- que l'amplification de ses cinq sens et surtout l'ouie venait du fait que le chakra du renard se mêlait peu à peu au sien.
C'était logique, le sceau faiblissait, et l'énergie du Neuf Queues était plus que jamais mélangée à celle de son hôte. En situation de combat, lorsque Naruto faisait plus particulièrement appel au chakra de son "locataire", ses cinq sens s'aiguisaient, mais petit à petit le chakra qui filtrait toujours plus ou moins s'était concentré de manière naturelle, permettant à Naruto d'avoir une ouie et un odorat plus développés dans la vie de tout les jours. La Vieille avait également ajouté que si l'on considérait qu'il était capable de développer des queues de chakra, cet effet secondaire ci était plutôt minime –voir même positif.
Cela dit la capacité était instable et fluctuantes, et Naruto avait parfois énormément de peine à la gérer. Face à ses (bruyantes) réclamations, Tsunade l'avait foudroyé du regard et avait –à son indicible horreur, elle n'allait pas faire ça, n'est ce pas ? Il y avait une loi… quelque chose… elle ne
pouvait pas…- fait appeler Kiba Inuzuka.
Et avait expliqué à ce dernier que les parents de Naruto avaient apparemment légué à ce dernier quelques fragments de capacité héréditaire mal identifiés qui s'éveillaient lentement. Kiba étant un spécialiste du problème –notamment au niveau de l'odorat, avait rappelé Naruto toute contenance retrouvée en ricanant- il était chargé d'aider le blond à se dépatouiller avec ses nouvelles capacités.
La couverture était plutôt bonne avait dû admettre Naruto avec reluctance –et un vague sentiment nauséeux à l'idée du mensonge, et de ce qui ce passerait si Kiba découvrait la
vraie raison.
Le jeune Inuzuka était peut-être une tête brûlée, mais il comprenait que le sujet des parents de Naruto était un point douloureux, et il n'avait pas posé plus de questions.
Les deux garçons s'entendaient comme des larrons en foire, et ils avaient passé des heures sans fin à battre les rues de Konoha ensemble, à la recherche d'odeurs affriolantes et de mauvais tours à jouer, parfois accompagnés de Shino. Ce dernier les fixait d’un regard désapprobateur à travers les verres teintés de ses lunettes lorsque Kiba essayait de draguer les filles en utilisant Akamaru comme rabatteur –ce dernier prenait alors son meilleur air «je suis un chien
teeeeellement mignon, avoues que tu ne peux pas t’empêcher d’avoir envi de me caresser…»- et faisait remarquer que ça aurait beaucoup mieux marché si ledit chien n’avait pas fait la taille d’un veau...
Du point de vue de Naruto, (du moins jusqu’à ce que le ninja aux insectes n’ajoute que ça marchait bien mieux avec les papillons, et que sous les regards atterrés des deux autres il ne le démontre par a + b à l’aide de magnifiques lépidoptères aux ailes irisées de bleu qui avaient
effectivement ramené dans leur sillage un groupe de filles émerveillés), Shino n’était pas quelqu’un de très drôle, voir même un peu beaucoup
bizarre.
Mais c’était l’un des rares avec Hinata à n’avoir jamais fait preuve d’une quelconque animosité envers lui quand ils étaient gamins, l’un des seuls qui ne se moquait pas avec les autres lorsque le regard des professeurs se faisait froid, et qu’ils raillaient sa question sur un point de cours.
Pour la première fois depuis longtemps –depuis le départ, non, la
désertion de Sasuke- Naruto avait eu la sensation que les gens autour de lui le voyaient. Il n'était plus l'idiot dernier de la classe, mais un ninja comme eux, un pair qui avait perdu un équipier.
Ils semblaient s'être donné le mot pour ne jamais le laisser seul trop longtemps, à broyer du noir, et rien que cette certitude réchauffait le cœur de Naruto.
Parfois il rejoignait l'équipe Gai et Sakura pour s'entraîner avec eux, et parfois il s'installait aux côtés de Shikamaru pour regarder les nuages (même si ça ne durait jamais longtemps, parce qu'il n'avait pas la patience nécessaire pour rester immobile plus d'une heure), et une fois Choji avait même accepté de partager ses chips.
Même Neji semblait l'apprécier, puisqu'il concédait parfois un peu de son précieux temps de Hyuuga pour s'entraîner avec lui.
Sakura aussi se comportait différemment. Elle le tapait encore à tout bout de champ (pour des raisons d'après lui bancales), pas de doute là-dessus, mais il y avait une chaleur dans leur relation qui n'avait pas existé avant.
Durant les deux ans qu'il avait passé loin du village elle avait changé, et à son retour il avait trouvé une jeune fille déterminée, bien différente de celle qui l’ignorait royalement et poursuivait de ses assiduités le troisième membre de l’équipe en glapissant « Sasuke-kuuuuuuuun !» à tout bout de champ.
Perdu dans ses pensées, il manqua de se prendre les pieds dans une branche couverte de givre qui poussait traîtreusement à mi-tibia, et trébucha en battant des bras avant de reprendre son équilibre. Kakashi-sensei ne cligna même pas de son œil visible –incroyable, il semblait encore plus apathique que d’habitude, si c’était humainement possible…-, Sakura soupira en secouant la tête mais son regard était chaleureux, et Sai renifla avec dédain.
Naruto le foudroya du regard tout en faisait bien attention ou il mettait les pieds (inutile de se ridiculiser en s’étalant de tout son long) et tira la langue avant d’accélérer pour rejoindre Sakura-chan.
Ce salaud de Sai… Ce type était tout simplement odieux, encore pire que Sasuke, et c’était peu dire… Il se déplaçait comme un zombie, souriait d’un sourire vide et prétendait ne rien ressentir, mais il se comportait comme… comme Sasuke !
Enfin non, pas vraiment. Il lui ressemblait beaucoup, parfois. Mais il était aussi très différent…. Il avait chez lui quelque chose… Quelque chose de quoi ? de faux ?
‘
Un sourire est la meilleur chose pour supporter les difficultés. Même si c’est un faux, tout le monde est aisément trompé.’
Non. Sasuke n’était pas comme ça.
Sasuke n’avait jamais vraiment sourit, que ce soit vrai ou faux. Il ne se dissimulait pas derrière un sourire, mais derrière le silence.
Et les insultes de Sasuke avaient fait bien plus mal que celles de cette enflure de Sai, qui tentait par tous les moyens de le provoquer…
‘
Tu es devenu… mon ami le plus proche.’
‘J’étais sérieux. J’ai essayé de te tuer.’
Sasuke… Pourquoi ? Pourquoi est ce que la première fois que tu as admis... qu’il y avait un lien… tu as essayé de le détruire ?
Stop.
Il fallait qu’il arrête de penser à Sai. Qu’il arrête de penser à Sasuke.
Neji avait raison : il le retrouverait, point final. Le reste n’avait pas d’importance.
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L'avant poste était en fait un petit village solitaire, situé sur la frontière avec le Pays du Riz et non loin de celui de l'Eau. La région n'était pas à proprement parler montagneuse, mais les Hauts Plateaux du Pays du Feu se terminaient là, brutalement, sur une immense falaise longue de plusieurs dizaine de kilomètres.
Il y avait très peu de brèches dans la fortification naturelle, et encore moins de passages praticables par quiconque d'autre que les chamois, fut il ninja. La muraille était ancienne, et la roche sédimentaire s'effritait, s'arrachant parfois par plaques de cinq cent mètre de hauts et allait alimenter les pierriers instables du cône d'éboulis. Il était
possible de passer en escalade pure, en choisissant avec précaution ses prises. Mais pour se faire il fallait être un grimpeur confirmé, et la course prenait plusieurs heures, offrant dix fois l'occasion d'être découvert –et puis jamais une armée ni même un groupe un tant soit peu important n'aurait pu passer, parce que ce qui était difficile de jour devenait impossible de nuit.
C'était cette même instabilité du Mur, leur expliqua la kunoïchi qui les attendait sur la route à quelques kilomètres avant Mailhoe pour les guider sur le reste du chemin, qui empêchait tout passage en se servant de son chakra : la surface était trop fragile, pas assez solide pour que l'on puisse de déplacer dessus en se servant de son chakra sans fissurer la roche instable.
"Beaucoup de ninja des deux pays ont essayé pourtant. En général on retrouve leurs corps dans les éboulis… Quelques uns réussissent à passer cependant, mais soit on les cueille en haut, soit ils tombent dans une faille." Elle fixa Naruto, qui bondissait déjà intérieurement à l'idée de réussir là ou tant d'autres avaient échoués. "Là-haut le relief est karstique. Le gel et l’érosion ont détruit toutes les parties plus tendres de la roche… Ca signifie que le sol est comme constitué de lamelles de roche à la verticale. Les trous peuvent être profond comme un avant bras, ou descendre à plusieurs dizaines de mètre sous la surface…"
Avec un regard à l'avance blasé sur les jeunes gens qui l'accompagnaient, Kakashi soupira et prit la suite.
"La plupart des failles sont juste assez large pour que votre pied s'y engouffre lorsque vous vous déplacez, et avec un peu de chance on s'en tire avec un genoux luxé ou une entorse, mais les blessures peuvent être bien plus grave. Et si vous vous cassez quelque chose en tombant dans une faille, ninja ou pas vous serrez dans de mauvais draps… Alors soyez extrêmement prudents où vous mettez vos pieds si vous allez là-haut, parce que les failles sont en partie recouvertes par la végétation et les touffes d'herbe…"
Naruto allait s'exclamer quelque chose comme "Evidement qu'on serra prudent, on l'est toujours.", quand son sensei lui adressa un regard perçant de son œil valide –incroyable l'intensité de gêne qu'il pouvait produire avec
un seul œil.
"Naruto, l'escalade ou la descente du Mur sont
formellement interdites, non seulement parce que cela t'amènerait dans le Pays du Riz, mais aussi parce que son instabilité est la meilleur protection de cette frontière, et que 'nettoyer' des pans entiers de la paroi ne serait pas excessivement bien vu, c'est compris ?"
"Pfff… évidement…"
Naruto avait l'air d'un gamin à qui l'on vient de retirer un paquet de feu d'artifices après en avoir tiré un ou deux sous son nez. Sakura aussi avait l'air un peu déçue. Quand Sai…
Sai n'avait l'air de rien, comme d'habitude. On aurait dit que les choses glissaient autour de lui sans vraiment le toucher.
La kunoïchi qui les accompagnait s'était présentée comme Kaede Hitomochi. Elle était très brune, d'un caractère apparemment assez ouvert, et plutôt belle ne pu s'empêcher de remarquer Naruto –même si évidement elle était un peu
vieille, et que la plus belle de toute manière c'était Sakura-chan, se dépêcha t'il d'ajouter mentalement.
Elle était vêtue de longues guêtres grises par-dessus sa tenue de jounin et d'une lourde veste doublée de fourrure –du lapin, identifia Naruto à l'odeur, avant même de s'en rendre compte- qui ne cachait pas totalement sa stature athlétique. Ses yeux étaient gris-bleu, un peu comme ceux de Kakashi-sensei, et quand elle souriait ses dents blanches mettaient en valeur son teint halé.
Elle connaissait visiblement Kakashi-sensei, car ils engagèrent la conversation d'un ton poli mais confortable.
"Cela faisait bien longtemps Kakashi-san…" Son regard passa sur eux, et elle gagna trois points dans l’estime de Naruto quand ses yeux croisèrent les siens sans refléter autre chose qu’une simple curiosité. "Voici donc votre fameuse équipe ?"
Le jounin hocha la tête comme si c’était un poids terrible, et qu’il n’y avait pas grand-chose de quoi être fier.
«Hé oui… »
Sai écoutait d'une oreille distraite la discussion entre leur chef d'équipe et la kunoïchi. Cette dernière avait l'air plutôt compétente a priori, et en tout cas elle connaissait parfaitement leur environnement, ce qui se révèlerait sans doute utile.
Elle était en train d'expliquer que les premières neiges ne tarderaient plus, et que les déplacements allaient se faire très difficile. Le professeur lança un regard en coin au crétin de service –évidemment, ce dernier n'avait pas encore réalisé que cela compromettait sa petite quête personnelle… Sakura, elle, était intelligente malgré son sourire hypocrite, et elle avait certainement compris depuis le début mais elle n'en dit rien, se contentant de poser plus de questions sur Mailhoe.
L'avant poste était situé sur l'unique véritable brèche du Mur, là où -disait la légende- un démon avait fendu la falaise en deux d'un coup de queue.
Légende ou non, la passe de Mailhoe était le seul vrai passage entre les deux pays sur plusieurs dizaines de kilomètres de distance, et qui voulait pénétrer dans le Pays du Feu par cette région devait forcément passer par là. Avant la guerre, il avait été un centre commercial très important, puisque tout les convois devaient passer par là, mais depuis le début de la guerre contre le Son –et par conséquent contre le pays du Riz qui le soutenait et lui offrait asile et moyens matériels- il était redevenu ce qu’il était des décades auparavant, quand la guerre déchirait sans fin les Cinq Pays : un point stratégique à tenir à tout prix.
Le village fortifié se trouvait en haut de la passe, la dominant à son endroit le plus étroit, là ou les murailles naturelles se rejoignaient presque. Les murs de pierre soigneusement équarris pour ne laisser aucune prise protégeaient le petit village, et de chaque côté les portes étaient gardées par des ninjas en faction. Lorsqu’ils arrivèrent finalement en vue des murs, leur troisième journée de voyage était bien avancée, et si Naruto ne ressentait aucune fatigue, ce n’était visiblement pas le cas pour Sakura ni même Sai, qui avaient accueilli avec plaisir le rythme notablement ralenti imposé par Kaede.
La dernière partie du trajet était de nouveau en pente, et la route longeait un instant la crête avant de redescendre un peu vers les portes.
Quand Naruto et Sakura posèrent les yeux sur le paysage qui s’offraient devant eux et ne purent retenir une exclamation stupéfaite, la jounin se contenta de sourire, et d’annoncer :
« Bienvenu à Mailhoe. »
A leurs pieds s’étendaient les monts sombres du pays du Riz, émergeant de la brume bleue comme le dos de créatures fantastiques qui se perdaient dans le lointain. L’impression dégagée était envoûtante, et étrangement mélancolique.
Naruto quitta le chemin, se rapprocha du bord pour examiner l’à-pic vertigineux sous ses pieds, et quand Kakashi vint le rejoindre, il se tourna vers lui avec une lueur inquiétante dans le regard.
« Et si je-… »
Kakashi secoua la tête d’une air amusé.
« Non Naruto, ça ne marche pas non plus si on essaye d’utiliser des jutsus de terre pour faire des marches… »
« … »
« … »
« … Kakashi-sensei… Vous avez déjà
essayé ! AVOUEZ ! »
Le Kakashi-sensei en question dégaina son bouquin porno, et disparu dans un courant d’air avant de réapparaître sur la route, environné un tourbillon de feuilles. (Tsss…
Poseur… Et en plus il n’y avait pas un arbre à des centaines de mètres à la ronde…)
« Aller Naruto, dépêche toi, ou nous finirons par arriver après la fin du jour. »
« …
Avouez, vous avez essayé !!! »
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Lorsque Naruto s'éveilla le lendemain, il faisait encore nuit.
La petite chambre qu'on leur avait allouée était déserte : Sai était partit Dieu sais où, probablement pour dessiner en paix, Sakura dormait encore dans sa chambre de l'autre côté du couloir, et la chambre de Kakashi-sensei semblait vide. (Naruto avait remarqué que leur professeur n'avait besoin que de ridiculement peu de sommeil, puisque même lorsque ses rêves l'éveillaient vers cinq heures et demi du matin, le ninja aux cheveux gris était la plupart du temps déjà levé…) Il devait sans doute être en train de discuter stratégie ou placement des troupes disponibles au mess des officiers, à moins qu'il ne se soit simplement retiré dans un coin pour lire tranquillement son bouquin porno.
En silence il s'habilla chaudement, enfila ses gants conversibles en mitaines, et sortit par la fenêtre.
Dans l'absolu, pas de gants du tout était le plus pratique pour former les sceaux, mais il fallait quand même avoir encore des doigts pour ce faire et non pas des glaçons ; et accessoirement il était aussi recommandé de pouvoir tenir un kunaï sans que le métal ne reste collé à la peau par le froid. Donc tout bien considéré, c'était les mitaines conversibles le plus pratique –Kaede leur avait donné quelques explications sur l'équipement nécessaire et la manière de s'en servir la veille au soir, et Sakura s'était ensuite empressé de le traîner faire les courses avant que tout les magasins ne soient fermé.
L'air froid lui piqua les yeux, mais acheva également de le réveiller tout à fait. Au-delà des cols le ciel de cendre commençait à s'éclaircir de gris-bleu, mais Mailhoe était encore plongé dans l'ombre, et tandis qu'il sautait de toit en toit, Naruto estima qu'il devait être quelque chose comme six heures du matin.
Il se demanda s'il y avait un marchand de ramen ouvert à cette heure-ci… Probablement pas.
Avec un grondement ennuyé il prit une ruelle qui longeait les contreforts de l'avant poste. Il y avait au moins une bonne heure à tuer avant l'ouverture des premiers magasins, il n'avait aucune envie de arpenter les rues en broyant du noir pendant une heure encore, et il se sentait incapable de simplement revenir à la chambre d'hôtel et de réveiller Sakura pour avoir un peu de compagnie.
Il restait donc la Solution Ultime et Universelle, celle qui réglait tout les problèmes : l'entraînement.
Plongé dans ses pensées, il ne sentit pas tout de suite la faible décharge de chakra quand quelqu'un prit son appel de l'autre côté du mur, et ce n'est que lorsqu'il entendit le frottement des sandales contre les lauzes couvertes d'une fine couche de glace et le bruit d'un dérapage au dessus de lui qu'il réagit.
En une fraction de seconde il avait tiré un kunaï et s'était ramassé en position basse, satisfait d'avoir dissimulé son chakra par habitude comme Ero-senin lui avait appris à le faire.
Le ninja inconnu roula jusqu'au bord du toit, et atterri en face de lui accroupie, une main en terre pour rétablir son équilibre. Il ne dû réaliser qu'à cet instant là qu'il n'était pas seul dans la ruelle, car un juron rauque lui échappa, et sa main libre vola vers sa poche à kunaïs tandis qu'il redressait la tête pour faire face à la menace.
Et à cet instant précis, le souffle de Naruto se gela dans sa gorge, parce que leurs regards s'étaient croisés.
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TBC